le fait de la copie, a sept francs la colonne, pour le
_Figaro_, dirige par Henri de Latouche. "C'est, dit-elle, le dernier des
metiers." Et dans une lettre a l'avocat Duteil: "J'essaye de fourrer des
articles dans les journaux. Je n'arrive qu'avec des peines infinies et
une perseverance de chien. Si j'avais prevu la moitie des difficultes
que je trouve, je n'aurais pas entrepris cette carriere. Eh bien, plus
j'en rencontre, plus j'ai la resolution d'avancer." Elle est, en effet,
envahie par une passion violente, irresistible, la passion d'ecrire. A
ce prix, elle supporte mainte privation et tout d'abord de peiner chaque
jour au _Figaro_, de neuf heures du matin a cinq heures, en qualite de
manoeuvre, "ouvrier-journaliste, garcon-redacteur." Puis elle ajoute:
"Le _journalisme_ est un postulat par lequel il faut passer."
Le soir, elle va assez frequemment au theatre; mais par esprit
d'economie--et en suivant, ecrit-elle a Boucoiran, certain conseil que
vous m'avez donne--elle s'habille en homme. Ainsi elle evite de renouveler
sa garde-robe, et c'est en costume d'etudiant qu'elle occupe, avec Jules
Sandeau et d'autres amis, les loges qu'Henri de Latouche lui donne presque
tous les soirs. Le bruit en est arrive jusqu'a sa mere, qui exprime son
etonnement de cette singularite. George Sand lui repond, pendant un de ses
sejours a Nohant, en feignant de prendre le change: "On vous a dit que je
portais culotte, on vous a bien trompee. En revanche, je ne veux point
qu'un mari porte mes jupes. Chacun son vetement, chacun sa liberte."
Parmi les relations litteraires que se crea George Sand a ses debuts, il
faut au premier rang placer Balzac. C'etait la rencontre des deux
ecrivains qui, dans le roman, allaient personnifier les tendances
contraires de l'idealisme et du realisme. Balzac n'avait pas encore
produit ses chefs-d'oeuvre, mais deja il manifestait cette humeur inquiete
et fastueuse qui devait sans cesse courir a la poursuite de la fortune, de
decouvertes merveilleuses et des fantaisies du luxe. L'_Histoire de ma
Vie_ raconte plaisamment qu'il avait amenage son petit appartement de la
rue de Cassini en boudoirs de marquise, tendus de soie et de dentelle.
Boheme a sa facon, il eprouvait le besoin du superflu et se privait de
soupe et de cafe plutot que d'argenterie et de porcelaine de Chine. Au
surplus, il avait des bizarreries et des caprices d'enfant, dont George
Sand relate un specimen tres caracteristique:
"Un soir qu
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