s de cinq vers et
_une_(?) hemistiche, et j'ai mange un fromage a la creme qui etait tout
aigre.
"Que Dieu vous conserve en joie, vous et votre progeniture, jusqu'a la
vingt-et-unieme generation.
_Yours truly_
Alfred de MUSSET.
George Sand, qui avait en si peu de temps eprouve de tels deboires d'amour,
affectait-elle de ne pas entendre les sollicitations du poete? Ou
voulait-elle--ce qui est bien feminin--l'amener et l'obliger a des
supplications encore plus pressantes? Toujours est-il que l'auteur de la
_Ballade a la Lune_ dut mettre les points sur les i et formuler sa requete
sentimentale. Il le fit dans une lettre naive et touchante, exempte de cet
insupportable dandysme qui recherchait les mots et le genre anglais:
"Mon cher George, j'ai quelque chose de bete et de ridicule a vous dire:
Je vous l'ecris sottement, au lieu de vous l'avoir dit, je ne sais
pourquoi, en rentrant de cette promenade. J'en serai desole ce soir. Vous
allez me rire au nez, me prendre pour un faiseur de phrases dans tous mes
rapports avec vous jusqu'ici. Vous me mettrez a la porte et vous croirez
que je mens. Je suis amoureux de vous, je le suis depuis le premier jour
ou j'ai ete chez vous. J'ai cru que je m'en guerirais tout simplement, en
vous voyant a titre d'ami. Il y a beaucoup de choses dans votre caractere
qui pourraient m'en guerir. J'ai tache de me le persuader tant que j'ai pu;
mais je paye trop cher les moments que je passe avec vous. J'aime mieux
vous le dire, et j'ai bien fait, parce que je souffrirai bien moins pour
m'en guerir a present, si vous me fermez votre porte.
"Cette nuit, pendant que (_ces deux derniers mots ont ete biffes par
George Sand a la plume, et la ligne suivante est coupee aux ciseaux dans
la lettre originale d'Alfred de Musset._)
"J'avais resolu de vous faire dire que j'etais a la campagne, mais je ne
veux pas vous faire de mysteres, ni avoir l'air de me brouiller sans
sujet. Maintenant, George, vous allez dire: "Encore un qui va m'ennuyer!"
comme vous dites. Si je ne suis pas tout a fait le premier venu pour vous,
dites-moi, comme vous me l'auriez dit hier en me parlant d'un autre, ce
qu'il faut que je fasse. Mais, je vous en prie, si vous voulez me dire que
vous doutez de ce que je vous ecris, ne me repondez plutot pas du tout. Je
sais comme vous pensez de moi, et je n'espere rien en vous disant cela. Je
ne puis qu'y perdre une amie et les seules heures agreables que j'ai
passees depuis un moi
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