sse de la maladie de Musset que personne, a
commencer par le medecin, n'a jamais ose appeler de son vrai nom. Le
medecin l'a poliment appelee "fievre typhoide", mais en realite c'etait le
"delirium tremens", effet final de la vie de debauches de Musset.[5]"
[Note 5: _George Sand, sa vie et ses oeuvres_, par Wladimir Karenine
(madame Komarof), II, 67.]
Il y a la une assertion que rien ne justifie ni n'etaie. Les exces
indeniables d'Alfred de Musset ne l'avaient pas conduit jusqu'a un acces
de delirium tremens, auquel d'ailleurs il n'aurait pas survecu vingt-trois
ans. La nature et les progres du mal peuvent se noter d'apres les lettres
que George Sand adressait a ses divers correspondants. Le 4 fevrier, elle
ecrit a Boucoiran: "Je viens encore d'etre malade cinq jours d'une
dysenterie affreuse. Mon compagnon de voyage est tres malade aussi. Nous
ne nous en vantons pas, parce que nous avons a Paris une foule d'ennemis
qui se rejouiraient en disant: "Ils ont ete en Italie pour s'amuser et ils
ont le cholera! quel plaisir pour nous! ils sont malades!" Ensuite madame
de Musset serait au desespoir si elle apprenait la maladie de son fils,
ainsi n'en soufflez mot. Il n'est pas dans un etat inquietant, mais il est
fort triste de voir languir et _souffroter_ une personne qu'on aime et qui
est ordinairement si bonne et si gaie. J'ai donc le coeur aussi barbouille
que l'estomac." Le lendemain, autre lettre plus sombre au meme Boucoiran:
"Je viens d'annoncer a Buloz l'etat d'Alfred qui est fort alarmant ce soir,
et en meme temps je lui demontre qu'il me faut absolument de l'argent
pour payer les frais d'une maladie qui sera serieuse et pour retourner en
France. Comme au bout du compte c'est un assez bon diable et qu'il a de
l'attachement pour Alfred, je crois qu'il comprendra ce que notre position
a de triste et qu'il n'hesitera plus... Adieu, mon ami, je vous ecrirai
dans quelques jours, je suis rongee d'inquietudes, accablee de fatigue,
malade et au desespoir. Embrassez mon fils pour moi. Mes pauvres enfants,
vous reverrai-je jamais? Gardez un silence absolu sur la maladie d'Alfred,
a cause de sa mere qui l'apprendrait infailliblement et en mourrait de
chagrin." Trois jours apres, le 8 fevrier, encore a Boucoiran: "Mon enfant,
je suis toujours bien a plaindre. Il est reellement en danger et les
medecins me disent: _poco a sperare, poco a disperare_, c'esta-dire que la
maladie suit son cours sans trop de mauvais symptomes alarman
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