sa plume au service de George
Sand, il provoquait pour elle, en combat singulier--tel un chevalier du
moyen age arborant les couleurs de sa dame--certain Capo de Feuillide qui,
dans l'_Europe litteraire_ du 22 aout 1833, avait parle de _Lelia_
irreverencieusement. Le duel eut lieu, mais l'issue n'en fut pas tragique,
aucun des adversaires n'ayant ete atteint. Toutefois on assure que la
balle de Gustave Planche alla, dans un pre voisin, tuer une vache que
Buloz dut payer cherement a son proprietaire. Seul, en effet, le directeur
de la _Revue des Deux Mondes_ etait assez cossu pour assumer une si lourde
indemnite.
A ce sujet fut composee une complainte, presque aussi longue que celle de
Fualdes, et intitulee: "Complainte historique et veritable sur le fameux
duel qui survint entre plusieurs hommes de plume, tres inconnus dans Paris,
a l'occasion d'un livre dont il a ete beaucoup parle de differentes
manieres, ainsi qu'il est relate dans la presente complainte." Il y a
vingt-quatre couplets. Citons les trois premiers:
Monsieur Capot de Feuillide
Ayant insulte _Lelia_,
Monsieur Planche, ce jour-la,
S'eveilla fort intrepide,
Et fit preuve de valeur
Entre midi et une _heur!_
Il ecrivit une lettre
Dans un francais tres correct,
Se plaignant que, sans respect,
On osat le meconnaitre;
Et, plein d'indignation,
Il passa son pantalon.
Buloz, dedans sa chambrette,
Sommeillait innocemment.
Il s'eveille incontinent,
Et bailla d'un air fort bete,
Lorsque Planche entra soudain,
Un vieux journal a la main.
Et voici la conclusion rimee de cette memorable affaire, qui ne fit pas
verser de sang, mais beaucoup d'encre:
Les combattants en presence
Firent feu des quatre pieds.
Planche tira le premier,
A cent toises de distance;
Feuillide, comme un eclair,
Riposta, cent pieds en l'air.
"Cessez cette boucherie,
Crierent les assistants,
C'est assez repandre un sang
Precieux a la patrie;
Planche a lave son affront
Par sa detonation."
Dedans les bras de Feuillide
Planche s'elance a l'instant,
Et lui dit en sanglotant:
"Nous sommes deux intrepides,
Je suis satisfait vraiment,
Vous aussi probablement."
Alors ils se separerent,
Et depuis ce jour fameux,
Ils vecurent tres heureux.
Et c'est de cette maniere
Qu'on a enfin reconnu
De George Sand la vertu.
Cette vertu, solennellement attestee, allait cependant subir une nouvelle
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