on courrier au nom de madame de Nohant-Dupin.
L'_Histoire de ma Vie_ lui prete des opinions democratiques qu'elle n'eut
jamais. Elle etait grisette dans l'ame et cherchait a inculquer a sa fille
des habitudes de frivolite et de coquetterie. Ne passait-elle pas des
heures a la coiffer a la chinoise? "C'etait bien, dit George Sand, la plus
affreuse coiffure que l'on put imaginer, et elle a ete certainement
inventee par les figures qui n'ont pas de front. On vous rebroussait les
cheveux en les peignant a contre-sens jusqu'a ce qu'ils eussent pris une
attitude perpendiculaire, et alors on en tortillait le fouet juste au
sommet du crane, de maniere a faire de la tete une boule allongee
surmontee d'une petite houle de cheveux. On ressemblait ainsi a une
brioche ou a une gourde de pelerin. Ajoutez a cette laideur le supplice
d'avoir les cheveux plantes a contre-poil; il fallait huit jours d'atroces
douleurs et d'insomnie avant qu'ils eussent pris ce pli force, et on les
serrait si bien avec un cordon pour les y contraindre qu'on avait la peau
du front tiree et le coin des yeux, releve comme les figures d'eventail
chinois." La grand'mere, qui trouvait ridicules toutes ces futilites et
qui n'avait pour les gouts vulgaires et plebeiens de sa bru aucune
indulgence, s'evertua et reussit a prendre en mains l'education d'Aurore.
Les deux femmes, vers la fin de 1810, rompirent la vie commune. L'enfant
passa presque toute l'annee a Nohant, sauf un court sejour a Paris en
hiver. Sophie, au contraire, domiciliee a Paris avec sa fille Caroline et
jouissant d'une pension que lui servait sa belle-mere, allait seulement a
Nohant pour la saison des vacances. Ce train d'existence dura jusqu'a la
fin de 1814.
Outre Ursule, Aurore avait un grand ami a la campagne: c'etait un ane,
tres vieux et tres bon, qui ne connaissait ni la corde ni le ratelier. On
le laissait errer en liberte. "Il lui prenait souvent fantaisie d'entrer
dans la maison, dans la salle a manger et meme dans l'appartement de ma
grand'mere, qui le trouva un jour installe dans son cabinet de toilette,
le nez sur une boite de poudre d'iris qu'il respirait d'un air serieux et
recueilli. Il avait meme appris a ouvrir les portes qui ne fermaient qu'au
loquet... Il lui etait indifferent de faire rire; superieur aux sarcasmes,
il avait des airs de philosophe qui n'appartenaient qu'a lui. Sa seule
faiblesse etait le desoeuvrement et l'ennui de la solitude qui en est la
consequence. Une n
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