Consul, qui venait de l'attacher a son etat-major: "Je fus a lui
pour le remercier de ma nomination. Il interrompit brusquement mon
compliment pour me demander qui j'etais.--Le petit-fils du marechal de
Saxe.--Ah oui! ah bon! Dans quel regiment etes-vous?--1er de
chasseurs.--Ah bien! mais il n'est pas ici. Vous etes donc adjoint a
l'etat-major?--Oui, general.--C'est bien, tant mieux, je suis bien aise de
vous voir.--Et il tourna le dos."
Apres avoir pris part a la bataille de Marengo, voici en quels termes
Maurice Dupin relate ses impressions, dans une lettre a son oncle de
Beaumont, ou, comme dit la suscription, au citoyen Beaumont, a l'hotel de
Bouillon, quai Malaquais, Paris:
"Pim, pan, pouf, patatra! en avant! sonne la charge! en retraite, en
batterie! nous sommes perdus! victoire! sauve qui peut! Courez a droite, a
gauche, au milieu! revenez, restez, partez, depechons-nous! Gare l'obus!
au galop! Baisse la tete, voila un boulet qui ricoche!... Des morts, des
blesses, des jambes de moins, des bras emportes, des prisonniers, des
bagages, des chevaux, des mulets; des cris de rage, des cris de victoire,
des cris de douleur, une poussiere du diable, une chaleur d'enfer; un
charivari, une confusion, une bagarre magnifique; voila, mon bon et
aimable oncle, en deux mots, l'apercu clair et net de la bataille de
Marengo, dont votre neveu est revenu tres bien portant, apres avoir ete
culbute, lui et son cheval, par le passage d'un boulet, et avoir ete
regale pendant quinze heures par les Autrichiens du feu de trente pieces
de canon, de vingt obusiers et de trente mille fusils."
Ce qui vaut mieux que tout ce verbiage, c'est qu'il fut nomme par
Bonaparte lieutenant sur le champ de bataille. Mais il apprehende la fin
de la guerre et il s'ecrie avec une pointe de gasconnade: "Encore trois ou
quatre culbutes sur la poussiere, et j'etais general." Le sejour
enchanteur de Milan va tourner d'autre cote ses preoccupations. Il est
amoureux, non pas a la legere comme il lui est advenu sur les bords du
Rhin ou a Nohant, mais avec tout l'emportement d'une passion qui veut etre
durable. Et il s'en ouvre a sa mere, dans une lettre ecrite d'Asola, le 29
frimaire an IX: "Qu'il est doux d'etre aime, d'avoir une bonne mere, de
bons amis, une belle maitresse, un peu de gloire, de beaux chevaux et des
ennemis a combattre!" La femme qui souleve tout cet enthousiasme--et qui
sera la mere de George Sand--s'appelait Sophie-Victoire-Antoinette
D
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