ncours a l'action politique; et
quand je serai electeur, j'ignore absolument s'il me sera possible de
voter avec l'impartialite et le discernement que je voudrais apporter
a cette noble fonction. En un mot, je me suis retranche jusqu'a nouvel
ordre, et qui sait pour combien d'annees, dans un jugement philosophique
des hommes et des choses de mon temps. C'est une souffrance profonde
parfois, quand je me souviens que j'ai vingt-cinq ans, et que j'ai
l'ardeur et le courage de ma jeunesse; c'est aussi une jouissance
infinie quand je considere que les passions politiques, avec leurs
erreurs, leurs egarements, leurs crimes involontaires, me sont pour
longtemps interdites, et que je puis garder sans lachete ma religion
sociale dans toute sa candeur. Mais comment voulez-vous qu'un homme
ainsi separe de vos mouvements et isole de vos agitations vous montre
la direction que vous devez prendre, vous, republicain de nature, de
position, et pour ainsi dire de naissance?
--Tout ce que vous dites la, reprit Horace, me donne beaucoup a penser.
Il y a donc une autre maniere d'aimer la republique et d'en pratiquer
les principes, que de se jeter en aveugle et a corps perdu dans les
mouvements partiels qui preparent sa venue? Oui, certes, je le savais
bien, je le sentais bien, et il y a longtemps que j'y songe! il est une
region de perseverance et d'action philosophique au-dessus de ces orages
passagers! il est un point de vue plus vrai, plus pur, plus eleve que
toutes les declamations et les conspirations emeutieres!
--Je n'ai tranche ainsi la question, repondis-je, que par rapport a
moi et a cause de ma situation pour ainsi dire exceptionnelle dans le
mouvement present. J'ignore ce que je ferais a votre place; cependant,
je puis vous dire que si j'etais royaliste, legitimiste et catholique,
comme la plupart des jeunes gens de ma caste, je n'hesiterais pas a me
joindre a la duchesse de Berri, comme a un principe.
--Vous feriez la guerre civile? dit Horace; eh bien, voila ce qu'on me
propose, voila ou l'on veut m'entrainer. Et moi je repugne a de tels
moyens, et j'attends mieux de la Providence.
--A la bonne heure! En ce cas, vous renoncez a jouer un role actif;
car une revolution parlementaire ne peut manquer de durer au moins un
siecle, au point ou en sont les choses.
--Un siecle! Le peuple n'attendra pas un siecle! s'ecria Horace,
oubliant la question personnelle pour la question generale.
--Soyez donc d'accord avec vous-mem
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