tir,
changeat de quartier, et s'eloignat d'un lieu ou certainement sa figure
avait ete remarquee dans les barricades et dans la maison mitraillee. Il
ne pourrait se montrer trois fois dans les rues environnantes sans que
des temoins malveillants ou maladroits fissent sur lui tout haut des
remarques qu'une oreille d'espion pouvait saisir au passage. Il resolut
donc d'aller demeurer a l'autre extremite de Paris. La difficulte
n'etait pas de sortir de sa retraite: il commencait a marcher, et, en
descendant le soir avec precaution, il etait facile de s'esquiver sans
etre vu. Mais il n'osait pas abandonner Marthe, dans l'etat de misere ou
elle se trouvait, aux persecutions d'un proprietaire qu'elle ne
pouvait pas payer, et qui, en verifiant l'etat des lieux, remarquerait
certainement l'effraction de la fenetre; alors ce creancier courrouce
livrerait peut-etre Marthe aux poursuites de la police. Enfin, comme en
restant les bras croises il ne detournerait pas ce peril, Paul se decida
a sortir de la maison avant le jour de l'echeance, et s'alla confier a
Louvet, qui sur-le-champ le mit en fiacre, l'installa a Belleville, et
alla porter a la vieille voisine l'argent necessaire pour tirer
Marthe d'embarras. On chercha ensuite un ouvrier devoue a la cause
republicaine: ce ne fut pas difficile a trouver; on lui fit reparer sans
bruit la lucarne, et Louvet amena Marthe, l'enfant et la voisine, qui ne
voulait plus les quitter, dans le pauvre local ou il avait etabli Arsene
sous son propre nom, en lui pretant son passe-port. Ce Louvet etait un
excellent jeune homme, le plus pauvre et par consequent le plus genereux
de tous ceux qu'Arsene avait connus dans l'intimite de Laraviniere. Paul
souffrait de ne pouvoir immediatement lui rembourser les avances qu'il
lui faisait avec tant d'empressement; mais, a cause de Marthe, il etait
force de les accepter. Louvet ne lui avait pas donne le temps de les
solliciter; en route il lui promit le secret sur toutes choses, et il le
garda si religieusement, que ce changement de situation me laissa dans
la meme ignorance ou j'etais sur le compte de Marthe et d'Arsene.
[Illustration: Son vieux ami le marquis de Vernes.]
A peine etabli a Belleville, Paul chercha de l'ouvrage; mais il etait
encore si faible, qu'il ne put supporter la fatigue, et fut renvoye.
Il se reposa deux ou trois jours, reprit courage, et s'offrit pour
journalier a un maitre paveur. Arsene n'avait pas de temps a perdre, et
pas de
|