etait compromise. Bientot
meme il apprit que le pont d'Arnheim venait d'etre emporte; il se hata
de faire filer sur ses derrieres ses bagages et sa grosse cavalerie, et
lui-meme dirigea sa retraite sur Deventer, vers les bords de l'Yssel.
Pichegru, profitant de l'occasion que lui offrait la fortune de
surmonter des obstacles ordinairement invincibles, se prepara a franchir
la Meuse sur la glace. Il se disposa a la passer sur trois points, et a
s'emparer de l'ile de Bommel, tandis que la division qui bloquait Breda
attaquerait les lignes qui entouraient cette place. Ces braves Francais,
exposes presque sans vetemens au plus rude hiver du siecle, marchant
avec des souliers auxquels il ne restait que l'empeigne, sortirent
aussitot de leurs quartiers, et renoncerent gaiement au repos dont ils
commencaient a peine a jouir. Le 8 nivose (28 decembre), par un froid de
dix-sept degres, ils se presenterent sur trois points, a Crevecoeur,
Empel et le fort Saint-Andre; ils franchirent la glace avec leur
artillerie, surprirent les Hollandais, presque engourdis par le froid,
et les defirent completement. Tandis qu'ils s'emparaient de l'ile de
Bommel, celle de leurs divisions qui assiegeait Breda en attaqua les
lignes, et les emporta. Les Hollandais, assaillis sur tous les points,
se retirerent en desordre, les uns vers le quartier-general du prince
d'Orange, qui s'etait toujours tenu a Gorcum, les autres a Thiel. Dans
le desordre de leur retraite, ils ne songerent pas meme a defendre les
passages du Wahal, qui n'etait pas entierement gele. Pichegru, maitre de
l'ile de Bommel, dans laquelle il avait penetre en passant sur les
glaces de la Meuse, franchit le Wahal sur differens points, mais n'osa
pas s'aventurer au-dela du fleuve, la glace n'etant pas assez forte pour
porter du canon. Dans cette situation, le sort de la Hollande etait
desespere si la gelee continuait, et tout annoncait que le froid
durerait. Le prince d'Orange avec ses Hollandais decourages a Gorcum,
Walmoden avec ses Anglais en pleine retraite sur Deventer, ne pouvaient
tenir contre un vainqueur formidable, qui leur etait de beaucoup
superieur en forces, et qui venait d'enfoncer le centre de leur ligne.
La situation politique n'etait pas moins alarmante que la situation
militaire. Les Hollandais, pleins d'esperance et de joie en voyant
s'approcher les Francais, commencaient a s'agiter. Le parti orangiste
etait de beaucoup trop faible pour imposer au parti republicain. P
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