ancais. Puisaye avait laisse, pour le remplacer aupres du
comite central, en qualite de major-general, un sieur Desotteux, se
disant baron de Cormatin. Les emigres, si abondans dans les cours de
l'Europe, etaient fort rares en Vendee, en Bretagne, partout ou l'on
faisait cette penible guerre civile. Ils affectaient un grand mepris
pour ce genre de service, et appelaient cela _chouanner_. Par cette
raison, les sujets manquaient, et Puisaye avait pris cet aventurier qui
venait de se parer du titre de baron de Cormatin, parce que sa femme
avait herite en Bourgogne d'une petite baronnie de ce nom. Il avait ete
tour a tour chaud revolutionnaire, officier de Bouille, puis chevalier
du poignard, et enfin il avait emigre, cherchant partout un role.
C'etait un energumene, parlant et gesticulant avec une grande vivacite,
et capable des plus subits changemens. Tel est l'homme que Puisaye, sans
le connaitre assez, laissa en Bretagne.
Puisaye avait eu soin d'organiser une correspondance par les iles de
Jersey; mais son absence se prolongeait, souvent ses lettres
n'arrivaient pas; Cormatin n'etait nullement capable de suppleer a sa
presence, et de ranimer les courages; les chefs s'impatientaient ou se
decourageaient, et ils voyaient les haines, calmees par la clemence de
la convention, se relacher autour d'eux, et les elemens de la guerre
civile se dissoudre. La presence d'un general comme Hoche etait peu
propre a les encourager; de sorte que la Bretagne, quoique moins epuisee
que la Vendee, etait tout aussi disposee a recevoir une paix adroitement
offerte.
Canclaux et Hoche etaient tous deux fort capables de la faire reussir.
On a deja vu agir Canclaux dans la premiere guerre de la Vendee: il
avait laisse dans le pays une grande reputation de moderation et
d'habilete. L'armee qu'on lui donnait a commander etait considerablement
affaiblie par les renforts continuels envoyes aux Pyrenees et sur le
Rhin, et, de plus, entierement desorganisee par un si long sejour dans
les memes lieux. Par le desordre ordinaire des guerres civiles,
l'indiscipline l'avait gagnee, et il s'en etait suivi le pillage, la
debauche, l'ivrognerie, les maladies. C'etait la seconde rechute de
cette armee depuis le commencement de cette guerre funeste. Sur
quarante-six mille hommes dont elle se composait, quinze ou dix-huit
etaient dans les hopitaux; les trente mille restant etaient mal armes et
la moitie gardait les places: ainsi quinze mille tout au plus etai
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