gs Saint-Antoine et Saint-Marceau,
les quartiers du Temple et de la Cite. Ils se voyaient dans les cafes
places au centre de ces differens quartiers; ils projetaient un
mouvement, mais sans avoir ni un plan ni des chefs bien avoues. Il se
trouvait parmi eux plusieurs hommes compromis, ou dans les comites
revolutionnaires, ou dans differentes fonctions, qui avaient beaucoup
d'influence sur la multitude; mais aucun d'eux n'avait une superiorite
decidee. Ils se balancaient les uns les autres, s'entendaient assez mal,
et n'avaient surtout aucune communication avec les deputes de la
Montagne.
Les anciens meneurs populaires, toujours allies soit a Danton, soit a
Robespierre, aux chefs du gouvernement, leur avaient servi
d'intermediaires pour donner le mot d'ordre a la populace. Mais les uns
et les autres avaient peri. Les nouveaux meneurs etaient etrangers aux
nouveaux chefs de la Montagne: ils n'avaient de commun avec eux que
leurs dangers et leur attachement a la meme cause. D'ailleurs les
deputes montagnards, restes en minorite dans les assemblees, et accuses
sans cesse de conspirer pour recouvrer le pouvoir, comme il arrive a
tous les partis battus, etaient reduits a se justifier chaque jour, et
obliges de protester qu'ils ne conspiraient pas. Le resultat ordinaire
d'une telle position est d'inspirer le desir de voir conspirer les
autres et la repugnance a conspirer soi-meme. Aussi les montagnards
disaient chaque jour: _Le peuple se soulevera; il faut qu'il se
souleve_; mais ils n'auraient pas ose se concerter avec lui pour amener
ce soulevement. On citait bien des propos imprudens de Duhem et de
Maribon-Montaut dans un cafe; l'un et l'autre avaient assez peu de
reserve et de mesure pour les avoir proferes. On repetait des
declamations de Leonard Bourdon a la societe sectionnaire de la rue du
Vert-Bois: elles etaient vraisemblables de sa part; mais aucun d'eux ne
correspondait avec les patriotes. Quant a Billaud, Collot, Barrere, plus
interesses que d'autres a un mouvement, ils craignaient, en y prenant
part, d'aggraver leur position, deja fort perilleuse.
Les patriotes marchaient donc tout seuls, sans beaucoup d'ensemble,
comme il arrive toujours lorsqu'il n'y a plus de chefs assez marquans.
Ils couraient les uns chez les autres, se donnaient le mot de rue a
rue, de quartier a quartier, et s'avertissaient que telle ou telle
section allait faire une petition ou essayer un mouvement. Au
commencement d'une revolution, l
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