ris. Puisaye avait conduit ses projets en homme aussi
actif qu'habile. Sans passer par l'intermediaire du vieux duc
d'Harcourt, inutile ambassadeur du regent a Londres, il s'adressa
directement aux ministres anglais. Pitt, invisible d'ordinaire pour
cette emigration qui pullulait dans les rues de Londres, et l'assiegeait
de projets et de demandes de secours, accueillit sur-le-champ
l'organisateur de la Bretagne, l'aboucha avec le ministre de la guerre
Vindham, qui etait un ardent ami de la monarchie et voulait la maintenir
ou la retablir partout. Les projets de Puisaye, murement examines,
furent adoptes en entier. L'Angleterre promit une armee, une escadre, de
l'argent, des armes, des munitions immenses, pour descendre sur les
cotes de France; mais on exigea de Puisaye le secret a l'egard de ses
compatriotes, et surtout du vieux duc d'Harcourt, envoye du regent.
Puisaye ne demandait pas mieux que de tout faire a lui seul; il fut
impenetrable pour le duc d'Harcourt, pour tous les autres agens des
princes a Londres, et surtout pour les agens de Paris, qui
correspondaient avec le secretaire meme du duc d'Harcourt. Puisaye
ecrivit seulement au comte d'Artois pour lui demander des pouvoirs
extraordinaires, et lui offrir de venir se mettre a la tete de
l'expedition. Le prince envoya les pouvoirs, et promit de venir
commander de sa personne. Bientot les projets de Puisaye furent
soupconnes, malgre ses efforts pour les cacher. Tous les emigres
repousses par Pitt, et econduits par Puisaye, furent unanimes. Puisaye,
suivant eux, etait un intrigant vendu au perfide Pitt, et meditant des
projets fort suspects. Cette opinion, repandue a Londres, s'etablit
bientot a Verone chez les conseillers du regent. Deja, dans cette petite
cour, l'on se defiait beaucoup de l'Angleterre depuis l'affaire de
Toulon; on concevait surtout des inquietudes des qu'elle voulait se
servir de l'un des princes. Cette fois on ne manqua pas de demander
avec une espece d'anxiete ce qu'elle voulait faire de M. le comte
d'Artois, pourquoi le nom de Monsieur n'etait pas compris dans ses
projets, si elle croyait pouvoir se passer de lui, etc. Les agens de
Paris, qui tenaient leur mission du regent, et partageaient ses idees
sur l'Angleterre, n'ayant pu obtenir aucune communication de Puisaye,
repeterent les memes propos sur l'entreprise qui se preparait a Londres.
Un autre motif les engageait surtout a la desapprouver. Le regent
songeait a recourir a l'Espagne, et
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