fait le 31 mai, lorsque le parti revolutionnaire, ayant a sa tete la
commune, l'etat-major des sections, et un grand nombre de deputes, pour
recevoir et donner le mot d'ordre, entoura la convention d'une foule
muette et armee, et, l'enfermant sans l'envahir, lui fit rendre, avec
une dignite apparente, les decrets qu'il desirait obtenir. Ici, pas
moyen de se faire entendre, ni d'arracher au moins la sanction apparente
des voeux des patriotes. Un canonnier, entoure de fusiliers, monte a la
tribune pour lire le plan d'insurrection. La lecture est a chaque
instant interrompue par des cris, des injures, et par le roulement du
tambour. Un homme veut prendre la parole, et s'adresser a la multitude.
"Mes amis, dit-il, nous sommes tous ici pour la meme cause. Le danger
presse, il faut des decrets: laissez vos representans les rendre." A
bas! a bas! lui crie-t-on pour toute reponse. Le depute Rhul, vieillard
d'un aspect venerable, et montagnard zele, veut dire quelques mots de sa
place, pour essayer d'obtenir du silence, mais on l'interrompt par de
nouvelles vociferations. Romme, homme austere, etranger a
l'insurrection, comme toute la Montagne, mais desirant que les mesures
demandees par le peuple fussent adoptees, et voyant avec peine que cette
epouvantable confusion allait etre sans resultat comme celle du 12
germinal, Romme demande la parole; Duroi la demande aussi pour le meme
motif: ni l'un ni l'autre ne peuvent l'obtenir. Le tumulte recommence,
et dure encore plus d'une heure. Pendant cette scene on apporte une tete
au bout d'une baionnette: on la regarde avec effroi, on ne peut la
reconnaitre. Les uns disent que c'est celle de Freron, d'autres disent
que c'est celle de Feraud. C'etait celle de Feraud, en effet, que des
brigands avaient coupee, et qu'ils avaient placee au bout d'une
baionnette. Ils la promenent dans la salle, au milieu des hurlemens de
la multitude. La fureur contre le president Boissy-d'Anglas recommence;
il est de nouveau en peril; on entoure sa tete de baionnettes, on le
couche en joue de tous cotes, mille morts le menacent.
Il etait deja sept heures du soir; on tremblait dans l'assemblee, on
craignait que cette foule, ou se trouvaient des scelerats, ne se portat
aux dernieres extremites, et n'egorgeat les representans du peuple, au
milieu de l'obscurite de la nuit. Plusieurs membres du centre
engageaient certains montagnards a parler pour exhorter la multitude a
se dissiper. Vernier essaie de dire aux
|