ses amis; comment voulez-vous faire une pareille
campagne contre des chouans, et presque sans armee?" Ce jeune capitaine
voyait ses talens consumes dans une guerre ingrate, tandis que des
generaux, tous inferieurs a lui, s'immortalisaient en Hollande, sur le
Rhin, a la tete des plus belles armees de la republique. Cependant il
continuait sa tache avec ardeur et une profonde connaissance des hommes
et de sa situation. On a vu qu'il avait deja donne les conseils les plus
sages, par exemple, d'indemniser les insurges restes paysans, et
d'enroler ceux que la guerre avait faits soldats. Une plus grande
habitude du pays lui avait fait decouvrir les veritables moyens d'en
apaiser les habitans, et de les rattacher a la republique. "Il faut,
disait-il, continuer de traiter avec les chefs des chouans; leur bonne
foi est fort douteuse, mais il faut en avoir avec eux. On gagnera, ainsi
par la confiance ceux qui ne demandent qu'a etre rassures. Il faudra
gagner par des grades ceux qui sont ambitieux; par de l'argent ceux qui
ont des besoins; on les divisera ainsi entre eux, et on chargera de la
police ceux dont on sera sur, en leur confiant les gardes territoriales,
dont on vient de souffrir l'institution. Du reste, il faudra distribuer
vingt-cinq mille hommes en plusieurs camps, pour surveiller tout le
pays; placer autour des cotes un service de chaloupes canonnieres qui
seront dans un mouvement continuel; faire transporter les arsenaux, les
armes et les munitions, des villes ouvertes, dans les forts et les
places defendues. Quant aux habitans, il faudra se servir aupres d'eux
des pretres, et donner quelques secours aux plus indigens. Si l'on
parvient a repandre la confiance par le moyen des pretres, la
chouannerie tombera sur-le-champ.--Repandez, ecrivait il a ses
officiers-generaux, le 27 ventose, repandez la loi salutaire que la
convention vient de rendre sur la liberte des cultes; prechez vous-memes
la tolerance religieuse. Les pretres, certains qu'on ne les troublera
plus dans l'exercice de leur ministere, deviendront vos amis, ne fut-ce
que pour etre tranquilles. Leur caractere les porte a la paix;
voyez-les, dites-leur que la continuation de la guerre les exposera a
etre chagrines, non par les republicains, qui respectent les opinions
religieuses, mais par les chouans, qui ne reconnaissent ni Dieu ni loi,
et veulent dominer et piller sans cesse. Il en est parmi eux de pauvres,
et en general ils sont tres interesses; ne neglige
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