rd de Fontanes Grand-Maitre,
triomphe de la contradiction. Mais Fontanes, en 1797, etait en effet
vaguement et politiquement religieux plutot que catholique, et, parlant
a un protestant, il dit la une de ces choses en l'air qui traversent
l'imagination d'un poete et dont sans doute il ne se souvenait pas le
lendemain. Il est possible aussi que de Candolle, en se ressouvenant,
ait trop precise le dire de Fontanes. ]
Le 18 fructidor, en frappant le journaliste, eut pour effet, par
contre-coup, de reveiller en Fontanes le poete, qui se dissipait trop
dans cette vie de polemique et de parti. Laissant madame de Fontanes a
Paris, il se deroba a la deportation par la fuite, quitta la France,
passa par l'Allemagne en Angleterre, et y retrouva M. de Chateaubriand,
qu'il avait deja connu en 89. C'est a l'illustre ami de nous dire en ses
_Memoires_ (et il l'a fait) cette liaison etroitement nouee dans l'exil,
ces entretiens a voix basse au pied de l'abbaye de Westminster, ces
doubles confidences du coeur et de la muse; et puis les longs regards
ensemble vers _cette Argos dont on se ressouvient toujours, et qui,
apres avoir ete quelque temps une grande douceur, devient une grande
amertume_. Fontanes n'hesita pas un seul instant a reconnaitre l'etoile
a ce jeune et large front. Quand d'autres spirituels emigres, le
chevalier de Panat et ce monde leger du XVIIIe siecle, paraissaient
douter un peu de l'astre prochain du jeune officier breton, tout reveur
et sauvage, Fontanes leur disait: "Laissez, messieurs, "patience!
il nous passera tous." Et a son jeune ami il repetait: "Faites-vous
illustre." M. de Chateaubriand, a son tour, lui rendait en conseils et
en encouragements ce qu'il en recevait; et quand Fontanes, apres avoir
repris vivement a la Grece sauvee, semblait en d'autres moments s'en
distraire, son ami l'y ramenait sans cesse: "Vous possedez le plus beau
talent poetique de la France, et il est bien malheureux que votre
paresse soit un obstacle qui retarde la gloire. Songez, mon ami,
que les annees peuvent vous surprendre, et qu'au lieu des tableaux
immortels que la posterite est en droit d'attendre de vous, vous ne
laisserez peut-etre que quelques cartons. C'est une verite indubitable
qu'il n'y a qu'un seul talent dans le monde: vous le possedez cet art
qui s'assied sur les ruines des empires, et qui seul sort tout entier
du vaste tombeau qui devore les peuples et les temps. Est-il possible
que vous ne soyez pas touche de to
|