de Barizel, Dayelle et Leplaquet s'empresserent au-devant de lui;
mais Corysandre, qui etait en conversation avec le duc de Naurouse dans
l'embrasure d'une fenetre en tete-a tete, ou qui plutot ecoutait le duc
de Naurouse, ne se derangea pas et elle attendit que Savine vint a elle,
sans lever les yeux, sans les tourner de son cote, toujours souriante et
attentive a ce que Roger lui disait.
Quand on avait annonce le prince, Roger, avait eu un moment d'emotion.
En voyant l'indifference qu'elle temoignait et qui certainement n'etait
pas jouee, une joie bien douce lui emplit le coeur. Assurement, elle
n'aimait pas Savine; jamais elle n'avait eprouve un sentiment tendre
pour lui. Et les remarques qu'il avait faites pendant leur promenade a
Eberstein se trouverent confirmees d'une facon frappante.
Elles le furent bien mieux encore lorsqu'on dut passer dans la salle a
manger.
A ce moment Savine, qui en entrant ne leur avait adresse que quelques
courtes paroles sur un ton peu gracieux, revint vers Corysandre pour la
conduire; mais vivement elle tendit la main a Roger qu'elle n'avait pas
quitte des yeux.
--J'accepte votre bras, monsieur le duc, dit-elle gaiement.
Savine, qui deja arrondissait le bras en souriant d'un air un peu plus
aimable, resta interloque, tandis que Corysandre impassible et Roger
tout heureux tournaient autour de lui pour suivre madame de Barizel et
Dayelle.
Si Leplaquet n'avait pas ete invite, Savine serait entre le dernier dans
la salle a manger. Il etait suffoque. Si Dayelle ne fut pas suffoque, au
moins fut-il fort etonne lorsque, arrive a sa place et se retournant, il
vit venir Corysandre et le duc de Naurouse, souriants l'un et l'autre,
tandis que Savine, la figure empourpree et les sourcils contractes, les
suivait avec Leplaquet. Eh quoi! etait-ce ainsi que cette petite sauvage
devait se conduire avec le prince, son pretendant, son futur mari, celui
qu'on desirait si vivement lui voir epouser? Et, dans son mouvement
de surprise, il pressa le bras de madame de Barizel pour appeler son
attention sur ce scandale. Mais elle ne repondit pas a cette pression,
et ses yeux ne suivirent pas la direction que l'attitude de Dayelle lui
indiquait; car il n'y avait la rien qui put la surprendre, puisque,
a l'avance, ce qui venait de se passer avait ete arrete entre elles.
C'etait elle, en effet, qui avait dit a Corysandre de prendre le bras
du duc de Naurouse, et de se conduire avec celui-ci de telle so
|