ce duc francais est amoureux pour de bon et parle, il parlera
lui-meme.
--Maintenant il faut que le duc de Naurouse parle comme vous dites.
--Il parlera. Bien qu'il ne m'ait pas annonce sa visite, je l'attends
aujourd'hui; je l'inviterai a diner pour apres-demain avec Savine,
Dayelle et vous. Corysandre devant Savine sera tres aimable pour le duc
de Naurouse, ce qui lui sera d'autant plus facile qu'elle n'aura
qu'a obeir a son impulsion, et elle ne fait bien que ce qu'elle fait
naturellement. De son cote, le duc de Naurouse sera tres tendre pour
Corysandre; cela, je l'espere, fondra la glace de Savine. Vous, de votre
cote, c'est-a-dire vous, mon cher Leplaquet, aide de Dayelle, vous
agirez sur le duc de Naurouse. Votre concours, je ne vous le demande
pas; je sais qu'il m'est acquis, entier et devoue. Celui de Dayelle, je
l'obtiendrai apres-demain.
--Voila ce que je n'aime pas.
--Ne dis donc pas de ces naivetes d'enfant, gros niais: tu sais bien
pour qui je me donne tant de peine et pour qui je veux devenir libre.
XII
Madame de Barizel ne s'etait pas trompee en pensant que le duc de
Naurouse ne manquerait pas de lui faire visite le jour meme.
Apres la promenade de la veille, n'etait-il pas tout naturel qu'il vint
prendre des nouvelles de leur sante? N'etaient-elles pas fatiguees? Et
puis il craignait que Corysandre n'eut eu froid sur la riviere.
Madame de Barizel le rassura: elle n'etait pas fatiguee; Corysandre
n'avait pas gagne froid, elle avait ete enchantee de cette promenade.
Cependant, bien que Roger prolongeat sa visite, la faisant durer plus
qu'il ne convenait peut-etre, Corysandre ne parut pas, car madame de
Barizel avait decide qu'il fallait exasperer l'envie que le duc de
Naurouse aurait de voir celle qui avait la veille produit sur lui une
si forte impression, et elle avait exige que sa fille restat dans
sa chambre. Corysandre avait commence par se revolter devant cette
exigence, puis elle avait fini par ceder aux raisons de sa mere.
--Veux-tu qu'il pense a toi?
--Oui.
--Veux-tu qu'il reve de toi?
--Oui.
--Eh bien, laisse-moi faire pour cette visite comme pour toutes choses;
on est stupide quand on ecoute son coeur, on ne fait que des sottises.
Elle etait restee dans sa chambre, mais en s'installant a la fenetre,
derriere un rideau, de facon a voir le duc de Naurouse quand il
arriverait et repartirait.
Apres une longue attente, Roger, perdant toute esperance de voir
Co
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