nue de le tenir, cet engagement, et
quoi qu'il put arriver, il le tiendrait.
Il etait un soldat et il savait obeir a son devoir: plutot mourir que
trahir.
--Eh bien, dit-elle, voyant qu'il se taisait, vous ne repondez pas?
--C'est que je n'ai rien a repondre, ou plus justement ce que j'ai a
dire, j'aimerais mieux le taire.
--Ah! mon Dieu! s'ecria-t-elle en mettant sa main sur son coeur.
Elle le regarda; il baissa les yeux.
--Mais ce que grand-papa m'a rapporte... dit-elle.
--Je n'ai point eu avec M. le comte de la Roche-Odon, la franchise que
je veux... que je dois avoir avec vous.
--Vous!
Ce mot lui alla au coeur tant il disait clairement qu'elle le croyait
incapable de duplicite ou de tromperie; mais en meme temps qu'il lui fut
doux il lui fut douloureux aussi, car il lui rappela que, sous peine de
manquer a cette confiance, il devait parler avec franchise entiere et
absolue.
--Assurement je n'ai pas trompe M. votre grand-pere, mais tout ce que je
devais dire je ne l'ai pas dit, puisqu'il a pu croire qu'il reussirait
dans la tache qu'il entreprenait; pour etre franc, j'aurais du lui
avouer qu'il ne... reussirait point.
--Mais puisqu'il doit avoir avec vous des entretiens...
--Ces entretiens n'auront pas le resultat qu'il espere.
--Comment le savez-vous a l'avance, puisque vous ne l'avez pas encore
entendu?
--Parce qu'il ne s'adressera pas, ainsi qu'il se l'imagine, a un esprit
flottant et indecis, mais bien a un esprit reflechi et resolu.
--Alors... vous ne croyez point?
Elle avait hesite avant de poser cette question formelle, et sa voix
avait faibli lorsqu'elle s'etait enfin decidee a la formuler.
De son cote il hesita aussi avant de repondre, mais l'heure des
faiblesses etait passee, il devait parler.
--Je ne crois point.
Elle fut accablee par ce coup; cependant elle voulut faire un dernier
effort:
--Vous croirez.
Sans repondre il secoua la tete par un geste qui en disait plus que
toutes les paroles.
--Pourquoi vous prononcer ainsi, des maintenant, sans savoir?
--Ah! certes j'ai la plus profonde admiration pour M. votre grand-pere,
pour sa foi, pour sa bonte, pour sa haute intelligence, mais ce n'est
pas avec l'admiration qu'on persuade, c'est avec la raison.
--Et pourquoi ne croiriez-vous pas? s'ecria-t-elle avec un mouvement de
depit et de colere.
--Voulez-vous donc que nous entreprenions une discussion religieuse;
voulez-vous que je vous explique pourquo
|