e penser a Richard.
Que lui importait miss Armagh!
Elle ne descendit que lorsque la cloche eut sonne le diner.
A la facon dont son grand-pere la regarda lorsqu'elle entra dans la
salle a manger, elle comprit que miss Armagh avait fait son rapport.
Cependant le comte ne lui adressa pas la moindre observation, mais il
parut preoccupe, et bien que, par suite de son abstinence habituelle, il
eut generalement bon appetit, il mangea ce soir-la moins encore que de
coutume.
Le diner fut long, car miss Armagh ne desserra les levres que pour
manger et boire, le comte ne prononca que quelques mots, et Berengere
resta perdue dans son reve.
Ce fut seulement lorsqu'on s'installa dans le salon, que M. de la
Roche-Odon interpella Berengere.
--Miss Armagh m'a rapporte... dit-il.
--Que j'avais ete peu convenable avec elle, interrompit Berengere.
--Mademoiselle! s'ecria l'institutrice.
--C'est parce que je parle de moi que je me sers de cette expression
adoucie, vous auriez pu en employer une plus severe, cela n'eut ete que
justice.
Cela dit en s'adressant a miss Armagh, elle se tourna vers son
grand-pere.
--Oui, grand-papa, les plaintes de miss Armagh sont pleinement fondees,
et je suis d'autant plus satisfaite qu'elle ait cru devoir t'en faire
part, que cela me permet de lui en temoigner tous mes regrets devant
toi.
Alors, quittant son siege et allant se placer devant son institutrice:
--Croyez bien, chere miss Armagh, que je n'oublierai jamais ce que vous
avez ete pour moi depuis mon enfance, votre bonte, votre indulgence,
votre sollicitude; j'ai eu le tort, le grand tort, tantot, de repondre a
vos observations...
--Mon enfant... voulut interrompre miss Armagh.
Mais Berengere ne la laissa pas parler, elle poursuivit vivement:
--Vous m'avez fait une observation parfaitement juste, et au lieu d'y
repondre comme je le devais, je me suis fachee; acceptez, je vous prie,
mes excuses et donnez-moi la main.
Miss Armagh se leva, ouvrit les bras dans son premier mouvement de
trouble, pour embrasser son eleve, puis ramenee aux convenances par la
reflexion, elle lui tendit la main.
Mais si puissant que fut chez elle ce sentiment des convenances, il
ne le fut pas encore assez cependant; si elle avait pu se retenir
d'embrasser Berengere, elle ne put pas empecher ses larmes de couler et
de tomber en deux grosses gouttes sur les mains de son eleve...
Pour sauver la situation, et en meme temps sa dignite, e
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