u vent dans les grands chenes, et la chanson
harmonieuse que les sapins murmuraient en se balancant.
Cent fois elle avait parcouru ce chemin, et cependant jamais encore elle
n'avait remarque la profondeur de ces lointains.
Cent fois elle avait entendu le vent souffler dans ces arbres, et jamais
encore elle n'en avait ete emue comme en ce moment.
Que se passait-il donc de mysterieux en elle, d'inconnu?
Ses yeux voyaient plus loin.
Ces bois, ces arbres, ces nuages qui couraient dans la ciel, ces
murmures qui l'enveloppaient, ce silence de la foret, lui parlaient un
langage qu'elle ne connaissait point.
Comme ces voix etaient douces! elles la transportaient dans un autre
monde que celui ou elle avait vecu jusqu'a ce jour, et son ame avec de
delicieux frissons s'ouvrait a des sensations qui etaient nouvelles pour
elle.
De temps en temps elle murmurait un nom:
--Richard.
Et alors s'arretant, elle regardait autour d'elle pour voir si elle
n'apercevait point celui que son coeur appelait.
Puis elle reprenait sa marche.
Ce n'etait plus a la gravite de son action qu'elle pensait, c'etait a
lui, a lui qu'elle aimait, qu'elle adorait.
Elle arriva bientot au bas de la colline, et la encore elle s'arreta
pour ecouter et regarder autour d'elle.
Elle n'entendit que le bruit du vent, et au loin quelques cris
d'oiseaux.
Elle eut ete heureuse de le trouver arrive avant elle.
Mais peut-etre l'etait-il.
Et vivement elle gravit le sentier qui avait remplace l'escalier par
lequel on montait autrefois au temple de la philosophie.
Deux fois seulement elle se retourna pour voir s'il ne montait pas
derriere elle, et s'il n'allait pas la rejoindre.
Mais les tournants de ce sentier etaient assez petits, et la vue, genee
d'ailleurs par les amas de gres et par les buissons de genevriers
pousses entre leurs fentes, ne s'etendait pas bien loin.
Quelqu'un qui l'aurait rencontree, n'aurait pas eu besoin d'une grande
penetration pour deviner ou allait cette jeune fille, dont les pieds
foulaient a peine la mousse du chemin, et dont le regard rayonnant etait
perdu dans le ciel.
Elle atteignit bientot le sommet de la colline; mais par suite des
fouilles entreprises pour trouver le tresor des la Roche-Odon, ce
plateau avait ete completement bouleverse, des excavations avaient ete
creusees, de sorte que les amas de terre, meles aux ruines du temple,
avaient devoye l'ancien escalier, et le sentier qui serpentait
ma
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