! sous un pretexte quelconque, ou meme sans pretexte,
car avec M. de Gardilane, il n'est pas necessaire de prendre des
precautions excessives, vous restez de quelques pas en arriere; oh!
pas beaucoup, huit ou dix pas, enfin assez pour ne pas entendre notre
entretien.
--Mais...
--Alors il y a surprise pour vous; c'est bien simple.
Elle dit cela gaiment, en riant, comme si reellement il s'agissait de la
chose la plus simple et la plus naturelle.
Bien qu'etant interloquee par cette demande bizarre, Miss Armagh s'etait
gardee de laisser paraitre les idees qui avaient traverse son esprit.
--Que veut-elle donc demander a M. de Gardilane? se disait-elle en
reflechissant, tandis que Berengere parlait.
Cet eclat de rire acheva de dissiper ses hesitations.
--C'est quelque cachotterie de petite fille, se dit-elle.
Et elle se mit a sourire en pensant aux inquietudes du comte: petite
fille des pieds a la tete, petite fille de coeur et d'esprit, rien que
petite fille.
Cela le prouvait de reste.
Il s'agissait d'une surprise; assurement d'une surprise que Berengere
voulait lui faire pour son jour de naissance qui arrivait dans trois
semaines, et c'etait pour cela qu'elle avait besoin de M. de Gardilane
qui, sans doute, irait a Paris d'ici-la.
Mais en quoi consistait cette surprise?
Et son imagination se mit a galoper sur cette piste: c'etait peut-etre
une theiere en argent que Berengere voulait lui donner, comme deja elle
lui avait donne deux tasses pour sa fete; a moins que ce ne fut une
parure en guipure dont elle avait parle. Mais non, le capitaine ne
savait pas acheter de la guipure: c'etait donc une theiere.
Pendant qu'elle cherchait ainsi, Berengere l'observait du coin de
l'oeil.
Enfin miss Armagh releva la tete:
--Je resterai de quelques pas en arriere, dit-elle.
Berengere voulut cacher son emotion sous le rire:
--Et vous n'ecouterez pas! dit-elle.
--Ah! mon enfant.
XXVI
Les choses etant ainsi arrangees, Berengere avait hate de se mettre en
route pour le chateau, c'est-a-dire de se trouver en tete-a-tete avec
Richard.
Elle entra dans la cuisine suivie de miss Armagh reflechissant toujours
a sa surprise, et apres avoir embrasse son filleul: "Adieu, Richard,
adieu, petit Richard, petit Richard adieu", ils prirent tous les trois
conge de Sophie.
Lorsqu'ils sortirent de la maisonnette, le soleil venait de s'abaisser
derriere la ligne des collines vaporeuses qui forment l'horizo
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