a musique. Doue lui-meme d'une jolie voix, il
chantait a la fin des repas de famille, selon la coutume aujourd'hui
presque partout delaissee. Il avait reuni, dans sa demeure, une
collection, relativement importante, de tableaux, de curiosites, de
souvenirs qu'on venait voir.
A Paris, ou il se rendait quelquefois, il ne manquait point de
visiter, aux Invalides, ses anciens compagnons d'armes. Il en
retrouvait aussi quotidiennement plusieurs, dans sa ville natale, au
cafe ou ils causaient de leurs campagnes. Au diner qui les reunissait
le jour anniversaire de l'entree des Francais a Moscou, ils buvaient,
a tour de role, dans un gobelet rapporte du Kremlin: les vieux soldats
de la Garde avaient le culte du passe.
Avec les journees de 1830 et le retour des trois couleurs[5], il pense
a reprendre du service; or sa famille jouit de quelque influence a
Conde, ou son frere est medecin[6]. Alors depute de Valenciennes, M.
de Vatimesnil, ancien ministre de Louis XVIII et de Charles X, dont il
vient de voter la decheance, ne manque pas d'appuyer un brave ayant
neuf campagnes, trois blessures et meconnu par le gouvernement tombe.
Comme compensation legitime, il propose sa nomination a l'emploi de
major de place, vacant a Conde. La lettre au marechal Soult, alors
ministre de la guerre, est contresignee par les deux autres deputes du
Nord, Brigode et Morel. La reponse n'arrivant point, M. de Vatimesnil
revient a la charge, quinze jours apres: "Cette nomination, ecrit-il,
qui serait excellente sous le rapport militaire, ne serait pas moins
utile sous le rapport politique. A une lieue de Conde se trouve le
chateau de l'Hermitage, appartenant a M. le duc de Croy, et ou sont
reunis beaucoup de mecontents. Loin de moi la pensee de supposer
qu'ils aient de mauvaises intentions! Mais, enfin, la prudence exige
qu'une place forte situee aussi pres de ce chateau, et sur l'extreme
frontiere, soit confiee a des officiers parfaitement surs. Je vous
reponds de l'energie de M. Bourgogne...." A defaut d'emploi, il
demande pour son protege la croix de la Legion d'honneur.
[Note 5: "En 1830, dit-il dans la note deja citee, a la
reapparition du drapeau tricolore, je rentrai au service."]
[Note 6: Notre sergent avait trois freres et une soeur dont il
etait l'aine, savoir: Francois, un moment professeur de mathematiques
au college de Conde; Firmin, mort jeune; Florence, mariee a un
brasseur; Louis-Florent, docteur en medecine de la Faculte de Par
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