que nous etions a Almeida, en
Portugal, a nous battre contre l'armee anglaise, commandee par
Wellington, que nous recumes l'ordre de partir pour la Russie.
Nous traversames l'Espagne, ou chaque jour de marche fut marque par un
combat, et quelquefois deux. Ce fut de cette maniere que nous
arrivames a Bayonne, premiere ville de France.
Partant de cette ville, nous primes la poste et nous arrivames a Paris
ou nous pensions nous reposer. Mais, apres un sejour de quarante-huit
heures, l'Empereur nous passa en revue, et jugeant que le repos etait
indigne de nous, nous fit faire demi-tour et marcher en colonnes, par
pelotons, le long des boulevards, ensuite tourner a gauche dans la rue
Saint-Martin, traverser la Villette, ou nous trouvames plusieurs
centaines de fiacres et autres voitures qui nous attendaient. L'on
nous fit faire halte, ensuite monter quatre dans la meme voiture et,
fouette cocher! jusqu'a Meaux, puis sur des chariots jusqu'au Rhin, en
marchant jour et nuit.
Nous fimes sejour a Mayence, puis nous passames le Rhin; ensuite nous
traversames a pied le grand-duche de Francfort[10], la Franconie, la
Saxe, la Prusse, la Pologne. Nous passames la Vistule a Marienwerder,
nous entrames en Pomeranie, et, le 25 juin au matin, par un beau
temps, non pas par un temps affreux, comme le dit M. de Segur, nous
traversames le Niemen sur plusieurs ponts de bateaux que l'on venait
de jeter, et nous entrames en Lithuanie, premiere province de Russie.
[Note 10: Francfort avait ete erige en grand-duche, en 1806, par
Napoleon, en faveur de l'electeur de Mayence.]
Le lendemain, nous quittames notre premiere position et nous marchames
jusqu'au 29, sans qu'il nous arrivat rien de remarquable; mais, dans
la nuit du 29 au 30, un bruit sourd se fit entendre: c'etait le
tonnerre qu'un vent furieux nous apportait. Des masses de nuees
s'amoncelaient sur nos tetes et finirent par crever. Le tonnerre et le
vent durerent plus de deux heures. En quelques minutes, nos feux
furent eteints; les abris qui nous couvraient, enleves; nos faisceaux
d'armes renverses. Nous etions tous perdus et ne sachant ou nous
diriger. Je courus me refugier dans la direction d'un village ou etait
loge le quartier general. Je n'avais, pour me guider, que la lueur des
eclairs. Tout a coup, a la lueur d'un eclair, je crois apercevoir un
chemin, mais c'etait un canal qui conduisait a un moulin que les
pluies avaient enfle, et dont les eaux etaient au niveau du so
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