nte, doit s'incliner et se signer!"
Un instant apres, nous descendions le Mont-du-Salut et, apres un quart
d'heure de marche, nous etions a la porte de la ville.
L'Empereur y etait deja avec son etat-major. Nous fimes halte; pendant
ce temps, je remarquai que, pres de la ville et sur notre gauche, il
se trouvait un immense cimetiere. Apres un moment d'attente, le
marechal Duroc qui, depuis un instant, etait entre en ville, se
presenta a l'Empereur avec quelques habitants qui parlaient francais.
L'Empereur leur fit plusieurs questions; ensuite le marechal dit a Sa
Majeste, qu'il y avait, dans le Kremlin, une quantite d'individus
armes dont la majeure partie etaient des malfaiteurs que l'on avait
fait sortir des prisons, et qui tiraient des coups de fusil sur la
cavalerie de Murat, qui formait l'avant-garde. Malgre plusieurs
sommations, ils s'obstinaient a ne pas ouvrir les portes: "Tous ces
malheureux, dit le marechal, sont ivres, et refusent d'entendre
raison,--Que l'on ouvre les portes a coups de canon! repondit
l'Empereur, et que l'on en chasse tout ce qui s'y trouve!"
La chose etait deja faite, le roi Murat s'etait charge de la besogne:
deux coups de canon, et toute cette canaille se dispersa dans la
ville. Alors le roi Murat avait continue de la traverser, en serrant
de pres l'arriere-garde des Russes.
Un roulement de tous les tambours de la Garde se fait entendre, suivi
du commandement de _Garde a vous!_ C'est le signal d'entrer en ville.
Il etait trois heures apres midi; nous faisons notre entree en
marchant en colonne serree par pelotons, musique en tete.
L'avant-garde, dont je faisais partie, etait composee de trente
hommes: M. Serraris, lieutenant de notre compagnie, la commandait.
A peine etions-nous dans le faubourg, que nous vimes venir a nous
plusieurs de ces miserables que l'on avait chasses du Kremlin; ils
avaient tous des figures atroces, ils etaient armes de fusils, de
lances et de fourches. A peine avions-nous passe au pont qui separe le
faubourg de la ville, qu'un individu, sorti de dessous le pont,
s'avanca au-devant du regiment: il etait affuble d'une capote de peau
de mouton, une ceinture de cuir lui serrait les reins, des longs
cheveux gris lui tombaient sur les epaules, une barbe blanche et
epaisse lui descendait jusqu'a la ceinture. Il etait arme d'une
fourche a trois dents, enfin tel que l'on depeint Neptune sortant des
eaux. Dans cet equipage, il marcha fierement sur le tambour-major
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