nt de plus en plus a
cette verite qui est notre but et notre tourment?
Je reste dans la question des decors. Voyez combien le decor abstrait
du dix-septieme siecle repond a la litterature dramatique du temps.
Le milieu ne compte pas encore. Il semble que le personnage marche en
l'air, degage des objets exterieurs. Il n'influe pas sur eux, et il
n'est pas determine par eux. Toujours il reste a l'etat de type, jamais
il n'est analyse comme individu. Mais, ce qui est plus caracteristique,
c'est que le personnage est alors un simple mecanisme cerebral; le
corps n'intervient pas, l'ame seule fonctionne, avec les idees, les
sentiments, les passions. En un mot, le theatre de l'epoque emploie
l'homme psychologique, il ignore l'homme physiologique. Des lors, le
milieu n'a plus de role a jouer, le decor devient inutile. Peu importe
le lieu ou l'action se passe, du moment qu'on refuse aux differents
lieux toute influence sur les personnages. Ce sera une chambre, un
vestibule, une foret, un carrefour; meme un ecriteau suffira. Le drame
est uniquement dans l'homme, dans cet homme conventionnel qu'on a
depouille de son corps, qui n'est plus un produit du sol, qui ne trempe
plus dans l'air natal. Nous assistons au seul travail d'une machine
intellectuelle, mise a part, fonctionnant dans l'abstraction.
Je ne discuterai point ici s'il est plus noble en litterature de rester
dans cette abstraction de l'esprit ou de rendre au corps sa grande
place, par amour de la verite. Il s'agit pour le moment de constater de
simples faits. Peu a peu, l'evolution scientifique s'est produite, et
nous avons vu le personnage abstrait disparaitre pour faire place a
l'homme reel, avec son sang et ses muscles. Des ce moment, le role des
milieux est devenu de plus en plus important. Le mouvement qui s'est
opere dans les decors part de la, car les decors ne sont en somme que
les milieux ou naissent, vivent et meurent les personnages.
Mais un exemple est necessaire, pour bien faire comprendre ce mouvement.
Prenez par exemple l'Harpagon de Moliere. Harpagon est un type, une
abstraction de l'avarice. Moliere n'a pas songe a peindre un certain
avare, un individu determine par des circonstances particulieres; il a
peint l'avarice, en la degageant meme de ses conditions exterieures, car
il ne nous montre seulement pas la maison de l'avare, il se contente de
le faire parler et agir. Prenez maintenant le pere Grandet, de Balzac.
Tout de suite, nous avons un avare
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