ou de vous forcer a donner de l'argent, il
sait bien qu'un _cavaliere_ comme vous trouve toujours a gagner ou a
emprunter une centaine d'ecus romains pour sauver sa vie d'un guet-apens.
--Merci, ma chere Mariuccia! Me voila renseigne, et je sais a qui j'ai
affaire. Messire Masolino Belli n'a qu'a bien se tenir; j'aurai toujours
une centaine de coups de baton francais a son service.
--Ne riez pas avec cela. Ils peuvent se mettre dix contre vous. Le
mieux, mon cher enfant, sera de vous bien cacher dans vos amours, et de
ne jamais voir la petite hors de cette maison-ci, ou mon neveu ne met
jamais les pieds.
--Et qui l'en empeche?
--Moi, qui le lui ai defendu une fois pour toutes. Il ne se generait pas
pour me desobeir et me frapper, s'il ne me devait quelque argent; mais
je le tiens par la crainte d'avoir a me payer.
Par la suite de la conversation, j'appris, sur ce fameux Masolino, des
details assez curieux. Cet homme n'est peut-etre pas toujours aussi
reellement ivre qu'il le parait. Son existence est mysterieuse. Il est
cense demeurer a Frascati; mais on ne sait jamais precisement ou il est.
Sa famille passe fort bien un mois et plus sans l'apercevoir. Il occupe
une chambre dans la maison ou Daniella est etablie; mais personne
n'entre jamais dans cette chambre, et, si l'on frappe a la porte, qu'il
y soit ou non, il ne repond jamais. Ses absences et ses apparitions
sont tout a fait imprevues. Il est toujours cense boire en secret dans
quelque cabaret du lieu ou des environs, avec des amis. C'est une
habitude de cachotterie qu'il a prise pour echapper aux reprimandes de
sa femme, et qu'il a gardee depuis qu'il est veuf; mais sa femme disait
autrefois qu'il devait cacher ses orgies dans quelque souterrain
inconnu, dans quelque lieu inaccessible, car elle l'avait maintes fois
cherche des semaines entieres, jusque dans les egouts de la ville, sans
retrouver aucune trace de lui. Quand il reparaissait, il lui echappait
des paroles qui pouvaient faire croire qu'il venait de loin; mais,
quelque pris de vin qu'il fut ou qu'il parut etre, jamais son secret ne
s'etait formule clairement. Il a exerce dans sa jeunesse la profession
de corroyeur; mais, depuis une dizaine d'annees, il n'a fait oeuvre de
ses bras, et on ne sait de quoi il a vecu.
--Il faut pourtant, ajoute la Mariuccia, qu'il ait plus que le
necessaire, puisqu'il trouve moyen de boire plus que sa soif.
D'apres tous ces renseignements, je soupconne ce _gal
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