s terreurs et des remords!
--Non, non! j'ai trop de bonheur pour sentir l'epine du repentir, et,
dusses-tu me repousser ou me fuir demain, je ne pourrais pas regretter
les deux jours qui viennent de m'etre donnes. Qu'importe que l'on pleure
dix ans si, en quelques heures, on a goute plus de joies que toute une
vie de malheur ne peut nous donner de souffrances?
--Ah! tu as raison, fille du ciel! la souffrance est un fait humain qui
peut s'evaluer et se mesurer: la joie, comme nous l'avons savouree, est
au-dessus de tous les calculs, puisqu'elle vient de Dieu.
--Elle vient de Dieu, c'est vrai! L'amour est comme le soleil, qui luit
pour les coupables aussi beau qup pour les justes. Je ne peux donc pas
rougir de t'aimer, ni m'en repentir en aucune facon. Seulement, je
compte avec mon juge, et je sais qu'il me fera expier mon ivresse.
J'attends donc quelque grand chatiment en cette vie ou en l'autre,
et, puisque je l'accepte d'avance, nous sommes quittes, lui et
moi!--C'est-a-dire, ajouta-t-elle apres m'avoir embrasse avec ardeur,
nous sommes quittes, si c'est moi seule qui ai a souffrir en ce monde ou
en l'antre, car, si c'etait toi, si tu devais etre puni a ma place...,
je me revolterais, je maudirais le ciel, qui m'aurait envoye une
punition cent fois plus grande que mon peche. Voila pourquoi je viens te
trouver et te dire qu'il faut de la prudence, car c'est toi qu'on menace
en ce moment a a cause de moi.
--Qui me menace?
--La police pontificale a ete saisie d'une plainte contre toi, deposee
par mon frere, a propos de ces maudites fleurs que tu as otees du
grillage de la madone. En eteignant la petite lampe, il parait que tu as
fait tomber d'abord le grillage, et puis de l'huile sur la fresque;
et ensuite mon frere, frappe et jete a terre par toi, ivre comme il
l'etait, a promene, en se relevant et en tatant la muraille, ses mains
remplies de fange sur la sainte image. Voila comment je peux expliquer
les taches et les souillures qu'elle portait le lendemain de cette
aventure; car, quelque mechant homme que soit Masolino, je ne veux pas
l'accuser d'avoir fait, expres une profanation aussi abominable. Il t'en
accuse, lui, et il pretend t'avoir surpris occupe a cette sceleratesse.
Il ne sait certainement pas quelle personne il a vue; mais, ayant
entendu dire que tu es entre une fois dans la maison que j'habite a
Frascati, il te soupconne et te designe. On ne le croit pas dans la
ville; mais les autorites, qui devr
|