semaine suivante. Car on etait poli, monsieur, dans ce
temps-la, et une maitresse de maison n'aurait pas su se contenter
d'envoyer sa carte en ajoutant a la main: "une tasse de the", ou "the
dansant", ou "the musical". Mais si on savait la politesse on n'ignorait
pas non plus l'impertinence. M. Decazes accepta, mais la veille du bal
on apprenait que mon grand-pere se sentant souffrant avait decommande la
redoute. Il avait obei au roi, mais il n'avait pas eu M. Decazes a son
bal....--Oui, monsieur, je me souviens tres bien de M. Mole, c'etait un
homme d'esprit, il l'a prouve quand il a recu M. de Vigny a l'Academie,
mais il etait tres solennel et je le vois encore descendant diner chez
lui son chapeau haut de forme a la main.
--Ah! c'est bien evocateur d'un temps assez pernicieusement philistin,
car c'etait sans doute une habitude universelle d'avoir son chapeau a la
main chez soi, dit Bloch, desireux de profiter de cette occasion si rare
de s'instruire, aupres d'un temoin oculaire, des particularites de la
vie aristocratique d'autrefois, tandis que l'archiviste, sorte de
secretaire intermittent de la marquise, jetait sur elle des regards
attendris et semblait nous dire: "Voila comme elle est, elle sait tout,
elle a connu tout le monde, vous pouvez l'interroger sur ce que vous
voudrez, elle est extraordinaire."
--Mais non, repondit Mme de Villeparisis tout en disposant plus pres
d'elle le verre ou trempaient les cheveux de Venus que tout a l'heure
elle recommencerait a peindre, c'etait une habitude a M. Mole, tout
simplement. Je n'ai jamais vu mon pere avoir son chapeau chez lui,
excepte, bien entendu, quand le roi venait, puisque le roi etant partout
chez lui, le maitre de la maison n'est plus qu'un visiteur dans son
propre salon.
--Aristote nous a dit dans le chapitre II..., hasarda M. Pierre,
l'historien de la Fronde, mais si timidement que personne n'y fit
attention. Atteint depuis quelques semaines d'insomnie nerveuse qui
resistait a tous les traitements, il ne se couchait plus et, brise de
fatigue, ne sortait que quand ses travaux rendaient necessaire qu'il se
deplacat. Incapable de recommencer souvent ces expeditions si simples
pour d'autres mais qui lui coutaient autant que si pour les faire il
descendait de la lune, il etait surpris de trouver souvent que la vie de
chacun n'etait pas organisee d'une facon permanente pour donner leur
maximum d'utilite aux brusques elans de la sienne. Il trouvait parfois
fer
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