donc connaitre ce
qui le concerne.
-- Meme ses affaires personnelles?
-- C'est donc d'affaires personnelles qu'il s'agit dans cette
lettre?"
Elle comprit qu'elle s'etait laissee surprendre.
"Je n'ai pas dit cela; mais je vous ai demande si, dans le cas
d'affaires personnelles, je devrais vous faire connaitre le
contenu de cette lettre.
-- C'est surtout s'il s'agit d'affaires personnelles que je dois
les connaitre, et cela dans l'interet meme de M. Vulfran. Ne sais-
tu pas qu'il est devenu malade, a la suite de chagrins qui ont
failli le tuer? Que tout a coup il apprenne une nouvelle qui lui
apporte un nouveau chagrin ou lui cause une grande joie, et cette
nouvelle trop brusquement annoncee, sans preparation, peut lui
etre mortelle. Voila pourquoi je dois savoir a l'avance ce qui le
touche, pour le preparer; ce qui n'aurait pas lieu, si tu lui
lisais ta traduction tout simplement."
Il avait debite ce petit discours d'un ton doux, insinuant, qui ne
ressemblait en rien a ses manieres ordinaires si raides et si
hargneuses.
Comme elle restait muette, le regardant avec une emotion qui la
faisait toute pale, il continua:
"J'espere que tu es assez intelligente pour comprendre ce que je
t'explique la, et aussi de quelle importance il est pour tous,
pour nous, pour le pays entier qui vit par M. Vulfran, pour toi-
meme qui viens de trouver aupres de lui une bonne place qui ne
peut que devenir meilleure avec le temps, que sa sante ne soit pas
ebranlee par des coups violents auxquels elle ne resisterait pas.
Il a l'air solide encore, mais il ne l'est pas autant qu'il le
parait; ses chagrins le minent, et d'autre part la perte de sa vue
le desespere. Voila pourquoi nous devons tous ici travailler a lui
adoucir la vie, et moi le premier, puisque je suis celui en qui il
a mis sa confiance."
Perrine n'eut rien su de Talouel, qu'elle se fut sans doute laisse
prendre a ces paroles habilement arrangees pour la troubler et la
toucher; mais apres ce qu'elle avait entendu, et des femmes de la
chambree qui a la verite n'etaient que de pauvres ouvrieres, et de
Fabry et de Mombleux qui eux etaient des hommes capables de savoir
les choses aussi bien que de juger les gens, elle ne pouvait pas
plus ajouter foi a la sincerite de ce discours, qu'avoir confiance
dans le devouement du directeur: il voulait la faire parler, voila
tout, et pour en arriver la tous les moyens lui etaient bons: le
mensonge, la tromperie, l'hypocrisie
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