r les personnes qui
ont interet a ce que M. Edmond soit mort, elles croient non moins
fermement, elles sont non moins sures qu'il est mort reellement,
et elles manoeuvrent de facon a se trouver maitresses de la
situation le jour ou la nouvelle de cette mort arrivera a
M. Vulfran qu'elle pourra bien tuer d'ailleurs. Maintenant, ma
chere enfant, comprenez-vous l'interet que vous avez, vous qui
vivez dans l'intimite de M. Vulfran, a vous montrer discrete et
reservee avec la mere de M. Casimir, qui, de toutes les manieres,
travaille pour son fils aussi bien que contre ceux qui menacent
celui-ci? Si vous etiez trop bien avec elle, vous seriez mal avec
la mere de M. Theodore. De meme que si vous etiez trop bien avec
celle-ci quand elle viendra, ce qui certainement ne tardera pas,
vous auriez pour adversaire Mme Bretoneux. Sans compter que si
vous gagniez les bonnes graces des deux, vous vous attireriez
peut-etre l'hostilite de celui qui a tout a redouter d'elles.
Voila pourquoi je vous recommande la plus grande circonspection.
Parlez aussi peu que possible. Et toutes les fois que vous serez
interrogee de facon a ce que vous deviez malgre tout repondre, ne
dites que des choses insignifiantes ou vagues; dans la vie bien
souvent on a plus d'interet a s'effacer qu'a briller, et a se
faire prendre pour une fille un peu bete plutot que pour une trop
intelligente: c'est votre cas, et moins vous paraitrez
intelligente, plus vous le serez."
XXXIV
Ces conseils, donnes avec une bienveillance amicale, n'etaient pas
pour rassurer Perrine, deja inquiete de la venue de Mme Bretoneux.
Et cependant, si sinceres qu'ils fussent, ils attenuaient la
verite plutot qu'ils ne l'exageraient, car precisement parce que
Mlle Belhomme etait physiquement d'une exageration malheureuse,
moralement elle etait d'une reserve excessive, ne se mettant,
jamais en avant, ne disant que la moitie des choses, les
indiquant, ne les appuyant pas, pratiquant en tout les preceptes
qu'elle venait de donner a Perrine et qui etaient les siens memes.
En realite la situation etait encore beaucoup plus difficile que
ne le disait Mlle Belhomme, et cela aussi bien par suite des
convoitises qui s'agitaient autour de M. Vulfran que par le fait
des caracteres des deux meres qui avaient engage la lutte pour que
leur fils heritat seul, un jour ou l'autre, des usines de
Maraucourt, et d'une fortune qui s'elevait, disait-on, a plus de
cent millions.
L'une, Mme Stanislas
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