ait des portraits sur une place de la
ville..."
Il chercha dans les papiers qu'il avait deplies sur un coin du
bureau de M. Vulfran.
"Puisque vous avez des pieces, lisez-les, dit M. Vulfran, ce sera
plus vite fait.
-- Je vais vous les lire; je vous disais qu'il avait travaille
comme photographe sur une place publique, la place Philippovitch.
Au commencement de novembre il quitta Serajevo pour..."
Il consulta de nouveau ses papiers:
"... pour Travnik, et tomba... ou arriva malade a un village situe
entre ces deux villes.
-- Mon Dieu, s'ecria M. Vulfran, mon Dieu, mon Dieu!"
Et il joignit les mains, le visage decompose, tremblant de la tete
aux pieds comme si la vision de son fils se dressait devant lui.
"Vous etes un homme de grande force...
-- Il n'y a pas de force contre la mort. Mon fils....
-- Eh bien oui, il faut que vous connaissiez l'affreuse verite: le
sept novembre... M. Edmond... est mort a Bousovatcha d'une
congestion pulmonaire.
-- C'est impossible!
-- Helas! monsieur, moi aussi j'ai dit: c'est impossible en
recevant ces pieces, bien que leur traduction soit visee par le
consul de France; mais cet acte de deces d'Edmond Vulfran
Paindavoine, ne a Maraucourt (Somme), age de trente-quatre ans,
n'emprunte-t-il pas un caractere d'authenticite a ces
renseignements memes, si precis? Cependant, voulant douter malgre
tout, j'ai, en recevant ces pieces hier, telegraphie a notre
consul a Serajevo; voici sa reponse: "Pieces authentiques, mort
certaine."
Mais M. Vulfran paraissait ne pas ecouter: affaisse dans son
fauteuil, ecroule sur lui-meme, la tete penchee en avant reposant
sur sa poitrine, il ne donnait aucun signe de vie, et Perrine
affolee, eperdue, suffoquee, se demandait s'il etait mort.
Tout a coup, il redressa son visage ruisselant de larmes qui
jaillissaient de ses yeux sans regard, et tendant la main il
pressa le bouton des sonneries electriques qui correspondaient
dans les bureaux de Talouel, de Theodore et de Casimir.
Cet appel etait si violent qu'ils accoururent aussitot tous trois.
"Vous etes la, dit-il, Talouel, Theodore, Casimir?
Tous trois repondirent en meme temps.
"J'apprends la mort de mon fils. Elle est certaine. Talouel,
arretez partout et immediatement le travail; telephonez qu'on
affiche qu'il reprendra apres-demain, et que demain un service
sera celebre dans les eglises de Maraucourt, Saint-Pipoy,
Hercheux, Bacourt et Flexelles.
-- Mon oncle!" s'e
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