ne semaine
retint M. Vulfran a la chambre, et donna l'entiere direction des
usines a Talouel triomphant.
Cependant ces accidents s'amenderent, mais la prostration morale
ne s'ameliora pas, et au bout de quelques jours il n'y eut plus
qu'elle qui inquieta le medecin.
Plusieurs fois Perrine avait essaye de l'interroger; mais il lui
avait a peine repondu, le docteur Ruchon n'etant pas homme a
s'interesser a la curiosite des gamines; heureusement il avait ete
moins rebarbatif avec Bastien et Mlle Belhomme, qu'il rencontrait
souvent a sa visite du soir, si bien que par le vieux valet de
chambre et par l'institutrice son anxiete etait tant bien que mal
renseignee.
"Il n'y a pas de danger pour la vie, disait Bastien, mais
M. Ruchon voudrait voir monsieur se remettre au travail."
Mlle Belhomme etait moins breve, et quand en venant au chateau
donner sa lecon, elle avait bavarde avec le medecin, elle repetait
volontiers a son eleve ce que celui-ci avait dit, ce qui
d'ailleurs se resumait en un mot toujours le meme:
"Il faudrait une secousse, quelque chose qui remontat la mecanique
morale arretee, mais dont le grand ressort ne parait cependant pas
casse."
Pendant longtemps on l'avait redoutee cette secousse, et c'etait
meme la crainte qu'elle se produisit inopinement qui, plusieurs
fois, avait retarde l'operation de la cataracte, que l'etat
general semblait permettre. Mais maintenant on la desirait.
Qu'elle se produisit, que M. Vulfran sous son impression reprit
interet a ses affaires, au travail, a tout ce qui etait sa vie, et
dans un avenir, prochain peut-etre, on pourrait sans doute la
tenter avec des chances de reussite, alors surtout qu'on n'aurait
pas a redouter les violentes emotions d'un retour ou d'une mort,
qu'au point de vue special de l'operation on pouvait egalement
redouter.
Mais comment la provoquer?
C'etait ce qu'on se demandait sans trouver de reponse a cette
question, tant il semblait detache, de tout, au point de ne
vouloir recevoir ni Talouel, ni ses neveux pendant qu'il avait
garde la chambre, et d'avoir toujours fait repondre par Bastien, a
Talouel, qui respectueusement venait a l'ordre deux fois par jour,
le matin et le soir:
"Decidez pour le mieux."
Et quand, quittant le lit, il etait revenu aux bureaux, a peine
s'etait-il fait rendre compte de ce qu'avait decide Talouel, trop
habile, trop adroit et trop prudent d'ailleurs pour prendre aucune
mesure que le patron n'eut pas prise l
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