ettez!... Ce que je dis la n'a rien d'offensant. Il se pourrait
fort bien qu'avant le jour ou j'ai eu l'honneur de lui etre presente,
mademoiselle votre soeur eut deja fixe son choix.
Il parlait si haut que Maxence, vivement, jeta les yeux autour de lui,
pour voir s'il n'etait personne a portee d'entendre. Il n'apercut
qu'un jeune homme que semblait absorber la lecture d'un journal.
--Enfin, monsieur, reprit-il, que repondriez-vous, si moi, le frere de
la jeune fille que vous pretendez epouser malgre elle, je vous sommais
de cesser vos assiduites.
Ceremonieusement, M. Costeclar s'inclina.
--Je vous repondrai, monsieur, prononca-t-il, que l'assentiment de
votre pere me suffit. Ma recherche n'a rien que d'honorable. Il se
peut que j'aie deplu a mademoiselle votre soeur; c'est un malheur,
mais il n'est pas irreparable. Quand elle me connaitra mieux, j'ose
esperer qu'elle reviendra sur d'injustes preventions. Je persisterai
donc.
Maxence n'insista pas. Si irrite qu'il fut du sang-froid de M.
Costeclar, il n'entrait pas dans ses vues de pousser plus loin.
--Il sera toujours temps, pensait-il, de recourir aux grands moyens.
Mais en rapportant a Mlle Gilberte cette conversation:
--Il est clair, disait-il, qu'il y a entre notre pere et cet homme
une communaute d'interets dont le sens m'echappe. Quelles affaires
brassent-ils ensemble? En quoi ton mariage peut-il les servir ou leur
nuire? Il faudrait voir, s'informer, tacher de decouvrir ce qu'est au
juste ce Costeclar, que Dieu confonde!
Il se mit en campagne le jour meme, et n'eut pas beaucoup a courir.
M. Costeclar etait une de ces personnalites qui ne s'epanouissent qu'a
Paris, qui ne se rencontrent qu'a Paris, non plus que les chevaux de
fiacre et les demoiselles a chignon jaune.
Il connaissait tout le monde, et tout le monde le connaissait.
Il etait bien connu a la Bourse et au passage de l'Opera, dans tous
les grands restaurants dont il tutoyait les garcons, au controle des
theatres, a toutes les agences de poules, et au _Cercle Europeen_,
autrement dit _Club des Nomades_ dont il faisait partie.
Il s'occupait d'operations de Bourse, c'etait sur. On le disait
interesse pour un tiers dans une charge d'agent de change. Il faisait
beaucoup d'affaires avec M. Jottras de la maison Jottras et frere,
et avec M. Saint-Pavin, le directeur d'un journal tres-repandu: _Le
Pilote financier_.
Ah! on savait encore qu'il avait, rue Vivienne, un magnifique
app
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