on pere, Monsieur, pour recevoir les maitres, repondit
Blaise. Maman m'a dit qu'il etait au chateau."
Et Blaise voulut entrer dans l'appartement; le domestique le saisit
par le bras:
LE DOMESTIQUE
Je t'ai dit, gamin, qu'on ne passait pas en blouse. Ton pere n'est
pas au chateau; ce n'est pas sa place ni la tienne non plus. Va le
chercher ailleurs.
BLAISE
Mais pourtant maman m'a dit...
LE DOMESTIQUE
Vas-tu finir et t'en aller, raisonneur! Si tu ajoutes un mot, je
t'epoussetterai les epaules du manche de mon plumeau."
Le pauvre Blaise se retira le coeur un peu gros, et retourna
tristement a la grille, ou l'attendait sa mere.
"Ils n'ont pas voulu me laisser entrer, maman; ils ont dit que papa
n'etait pas au chateau, et que je n'y pouvais pas entrer en blouse. Du
temps de M. Jacques, j'y entrais bien, pourtant.
--Je crains que tu n'aies devine juste, mon pauvre Blaise, dit Mme
Anfry en soupirant. On dit: _tels maitres, tels valets_. Les valets ne
sont pas bons, il se pourrait que les maitres ne le fussent pas non
plus... Comment allons-nous faire? Ils ne seront pas contents si ton
pere n'est pas ici pour les recevoir. Un concierge doit etre a sa
grille.
BLAISE
Voulez-vous que je retourne au chateau, maman? Je le trouverai
peut-etre aux ecuries.
MADAME ANFRY
Trop tard, mon ami, trop tard; j'entends claquer des fouets. Ce sont
les maitres qui arrivent."
Comme elle achevait ces mots, elle vit accourir Anfry, essouffle et
suant, juste au moment ou un nuage de poussiere annoncait l'approche
de la voiture de poste.
Anfry se placa, le chapeau a la main, d'un cote de la grille; Mme
Anfry se rangea avec Blaise de l'autre cote: la berline attelee de
quatre chevaux de poste apparut, tourna au galop et enfila l'avenue
du chateau. Elle passa si rapidement que Blaise eut a peine le temps
d'apercevoir un monsieur et une dame au fond de la voiture, un petit
garcon et une petite fille sur le devant. Ils passerent sans repondre
aux reverences de Mme Anfry et aux saluts du concierge; la petite
fille seule salua.
Quand la voiture fut hors de vue, le mari et la femme se regarderent
d'un air chagrin; ils fermerent lentement la grille, rentrerent sans
mot dire dans leur maison et s'assirent pres d'une table sur laquelle
etait prepare leur frugal diner. Blaise vint les rejoindre et, de meme
que ses parents, se placa silencieusement pres de la table.
"Mon ami, dit enfin Mme Anfry, comment trouves-tu les
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