a personne, pas meme a M. Jules, qui me fait tant de mal...
Pauvre M. Jules: il est bien malheureux d'etre si mauvais; il doit
toujours craindre que la verite ne se sache!... Pauvre garcon! je vais
bien prier le bon Dieu pour qu'il change et devienne bon... Papa me
croit, heureusement; j'en dois bien remercier le bon Dieu! C'est la
ou j'aurais eu du chagrin, si papa et maman m'avaient cru mechant et
menteur.
Console par ces reflexions, Blaise reprenait sa promenade, mais il
etait triste malgre lui, et il songeait au temps heureux ou il avait
le bon petit Jacques pour maitre et pour ami.
Jules, pendant ce temps, s'ennuyait beaucoup; il jouait peu avec
Helene, a laquelle il faisait sans cesse des mechancetes, et qui
aimait mieux jouer seule ou travailler et causer avec sa mere.
Deux mois au moins apres sa derniere aventure avec Blaise, Jules
demanda un jour si instamment a son pere de faire venir Blaise pour
l'aider a becher son jardin, que M. de Trenilly y consentit. Jules
n'osa pas aller le chercher lui-meme, car il avait peur d'Anfry, mais
il dit a un domestique de faire venir Blaise de la part de M. de
Trenilly et de l'amener dans le petit jardin.
Blaise fut tres surpris d'etre demande par M. le comte; son pere lui
dit qu'il devait obeir, et malgre sa repugnance il se dirigea vers
le jardin de Jules et d'Helene, ou il croyait trouver le comte. En
apercevant Jules, il voulut se retirer, mais Jules courut a lui et
l'entraina vers un carre de legumes en lui disant:
"Papa te fait dire d'arracher ces legumes, de becher tout cela et d'y
planter des fleurs du potager.
--Je n'ai pas apporte ma beche, dit Blaise.
--Cela ne fait rien; tu vas prendre celle d'Helene", dit Jules avec
joie et empressement, car il s'etait attendu a un refus, sentant bien
que Blaise devait se trouver gravement offense.
Le pauvre Blaise, ne voulant pas desobeir a un ordre qu'on lui donnait
de la part de M. de Trenilly, prit la beche sans mot dire et commenca
son travail.
JULES
Pourquoi ne parles-tu pas, Blaise? tu es toujours si gai et si dispose
a causer.
BLAISE
Je ne le suis plus, Monsieur.
--Pourquoi? dit Jules en rougissant, car il ne devinait que trop la
cause du silence et du serieux de Blaise.
BLAISE
Depuis que vous m'avez calomnie, Monsieur Jules; mais je ne vous en
veux pas pour cela; seulement je prie le bon Dieu de vous corriger, et
je n'aime pas a me trouver seul avec vous.
--Est-ce que tu as peur que
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