s et comme il l'a deja ete plus d'une fois vis-a-vis de mon fils,
j'exige, sous peine de quitter mon service, que vous le fouettiez
vigoureusement.
ANFRY
Monsieur le comte n'aurait pas besoin de me le recommander, s'il
s'etait rendu coupable de mechancete, de calomnie, de mensonge. Si je
voyais mon fils dans une aussi triste voie, je l'en arracherais par
la force de mon propre mouvement. Dieu merci, mon fils est franc et
honnete, et je n'ai pas a rougir de lui."
En achevant ces mots, Anfry salua et se retira plein d'indignation et
d'irritation contre les mensonges de Jules et la faiblesse du pere.
M. de Trenilly retourna pres de Jules, le questionna de nouveau et lui
redit ce qu'il avait appris d'Anfry. Jules, ne pouvant nier sa visite
chez Anfry et son depart en l'absence de Blaise, avoua ces deux
circonstances, qu'il n'avait pas ose reveler, dit-il, de peur d'etre
gronde pour avoir ete seul dans les champs; mais il soutint qu'ayant
trouve Blaise a l'endroit indique par Anfry, tout s'etait passe comme
il l'avait d'abord raconte.
M. de Trenilly ne sut plus que croire ni qui croire. Il y avait dans
les aveux tardifs de Jules quelque chose qui ebranlait sa confiance
pour le reste; mais il ne pouvait, il n'osait admettre tant de
faussete et de mechancete dans son fils bien-aime. Dans le doute, il
n'en parla plus, ne voulant pas faire punir injustement Blaise et ne
pouvant lui donner raison.
VIII
LES FLEURS
Quelque temps se passa ainsi; Jules avait recu la defense expresse de
jouer avec Blaise, que les gens du chateau regardaient d'un air de
mefiance. Personne ne lui parlait; on lui tournait le dos quand il
venait faire une commission au chateau; on refusait sechement ses
offres de service. Helene etait la seule qui lui dit un bonjour amical
en passant devant la grille. M. de Trenilly le repoussait durement
quand Blaise, toujours obligeant, se precipitait pour lui ouvrir la
porte.
Le pauvre Blaise s'attristait souvent de la mauvaise opinion qu'on
avait de lui; il allait plus souvent que jamais faire sa promenade
favorite et solitaire le long de la petite riviere longeant les fours
a chaux. Arrive la, il s'asseyait et il pleurait.
"Le bon Dieu sait, disait-il, que je suis innocent de ce dont on
m'accuse; mais j'ai commis bien des fautes dans ma vie, et le bon
Dieu me les faits expier... Je dois l'en remercier au lieu de me
revolter... Il me donnera le courage de tout supporter, de n'en
vouloir
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