leur poulailler, ou tu me trouveras.
--Irai-je a la cuisine, Mademoiselle, pour demander du pain et du
lait?
--Non, non, ne va pas a la cuisine. Maman a defendu que tu entres au
chateau.
--Ainsi on me croit toujours un vaurien, un voleur, dit Blaise en
soupirant. C'est triste, mais c'est bon, car j'en ferai mieux ma
premiere communion, en supportant ces affronts avec courage et
douceur... Je vais demander a maman ce qu'il nous faut pour les
poulets. Ne vous impatientez pas, Mademoiselle, si je suis un peu
longtemps; il y a loin d'ici chez nous, l'avenue est longue."
Helene resta pres de ses poulets; elle aussi etait triste, car elle
sentait combien etait injuste la mauvaise opinion qu'on avait de
Blaise, et elle s'affligeait que ce fut son frere qui eut fait tout ce
mal.
"Pauvre Blaise! se dit-elle en le regardant s'eloigner. Le bon Dieu
fera sans doute connaitre son innocence; mais en attendant il souffre
et Jules triomphe. Oh! si Jules pouvait comprendre combien il est
mauvais! L'annee prochaine il doit faire sa premiere communion;
comment pourra-t-il la faire s'il ne reconnait pas ses torts?..."
Helene eut le temps de reflechir, car Blaise ne revint qu'au bout
d'une demi-heure.
"Voici, Mademoiselle, cria-t-il de loin, une patee faite par maman.
J'ai ete longtemps, car il a fallu la preparer, puis revenir pas trop
vite pour ne pas renverser l'assiette; elle est bien pleine, les
poulets vont se regaler."
Et il posa l'assiette au milieu du poulailler; les quatre poulets
affames se precipiterent dessus et picoterent jusqu'a ce qu'il n'en
restat miette.
Blaise conseilla a Helene de tenir ses poulets enfermes pendant
deux ou trois jours, pour qu'ils pussent s'habituer a leur nouvelle
demeure. En peu de semaines ils devinrent de beaux poulets gras et
forts. Jules s'en informait avec interet de temps en temps; Helene
lui en sut gre et crut que c'etait un commencement de repentir et
d'amelioration. Un jour que Mme de Trenilly preparait le diner, Jules
lui dit:
"Quand donc mangerons-nous les poulets d'Helene? Le cuisinier en
ferait volontiers une fricassee.
--Manger mes poulets! s'ecria Helene effrayee, j'espere bien, maman,
que vous n'y avez pas songe, et que c'est une invention de Jules.
--Je croyais, comme Jules, que tu les elevais pour les manger, Helene,
dit Mme de Trenilly.
--Mais non, maman, je n'ai jamais eu la pensee de les manger. Je veux
garder ces jolies volailles pour qu'elles pond
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