que nous lui devons.
BLAISE
Mon cher, mon bon Monsieur le comte, ne parlez pas de reconnaissance;
apres ce que M. Jules a fait aujourd'hui, la reconnaissance est toute
de mon cote...
JULES
Non, non! moi, je n'ai fait que reparer; toi, tu as pardonne et tu
t'es devoue avant la reparation.
LE COMTE
Jules a raison, Blaise; nous admettons que nous soyons quittes envers
toi, ce qui n'est pas et ne pourra jamais etre: nous souffrirons
toujours dans notre affection pour toi, d'abord en nous trouvant
souvent prives de ta presence, ensuite en te sachant meconnu par celle
qui devrait t'apprecier mieux que tout autre.
BLAISE
Cher Monsieur le comte, le bon Dieu fait bien tout ce qu'il fait; ce
qui arrive est peut-etre pour notre bien a tous. Et d'abord n'est-ce
pas un bonheur de souffrir en ce monde pour recevoir une plus grande
recompense dans l'autre vie? Ne pouvons-nous pas continuer a nous
aimer sans nous voir autant, et en nous donnant le merite d'accepter
avec resignation et douceur cette peine que le bon Dieu nous envoie?
Cher Monsieur le comte, je vous aime, vous le savez, avec toute la
tendresse de mon coeur; mais je me resignerais a ne plus jamais vous
voir si c'etait la volonte du bon Dieu! Helas! peut-etre ne vous
embrasserai-je plus jamais, jamais, ni M. Jules non plus!
--Tu m'embrasseras du moins ce soir, et tant que tu voudras, mon
enfant", dit le comte en le serrant contre son coeur.
Blaise usa largement de la permission; mais la soiree etait avancee;
il etait temps de se separer. Blaise dit un dernier adieu a Jules et
au comte et se retira en sanglotant.
"Papa, dit Jules, vous continuerez a coucher dans ma chambre, que je
vous aie toujours pres de moi?
--Tant que tu n'auras pas repris tes forces et ta sante habituelles,
je coucherai pres de toi, mon cher enfant; quand tu seras tout a fait
bien, je reprendrai ma chambre. Il faut s'habituer aux sacrifices, mon
Jules; celui-la sera moins penible que celui auquel nous allons etre
condamnes en nous privant de Blaise.
--C'en sera un de plus, papa, dit Jules tristement.
--Et ce ne sera probablement pas le dernier ni le plus grand, mon
ami. Mais viens dire adieu a ta mere et a la pauvre Helene, et allons
ensuite nous coucher. N'oublions pas qu'au travers de notre tristesse
nous avons bien a remercier le bon Dieu, toi d'avoir eu le courage de
faire l'aveu public de tes fautes, moi d'avoir recu cette consolation.
Viens, mon Jules, sois auss
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