tre le mur, fort embarrassee
de sa personne. Il lui donna le bras, l'entraina vers la table, et, la
placant en face d'Anfry, il se mit aussi a sa droite, Helene prit le
bras de Blaise, qui se mit entre elle et Jules, et le repas commenca.
Dans les premiers moments, le comte et la comtesse ne s'apercurent
pas de l'embarras d'Anfry, qui essuyait son front inonde de sueur,
et n'osait ni manger ni lever les yeux de dessus son assiette restee
pleine. Mme Anfry avait pris son parti; la faim avait surmonte la
timidite.
Blaise s'apercut bien vite du trouble de son pere, et, se penchant
vers Helene, il lui dit tout bas: "Mademoiselle Helene, mon pauvre
papa a peur; il n'ose pas manger, et pourtant il a bien faim, j'en
suis sur."
Helene, levant les yeux, regarda Anfry et sourit de son air
malheureux. Se penchant a son tour vers l'oreille de son pere, elle
lui fit remarquer le malaise du pauvre Anfry, qui s'essuyait le visage
avec un redoublement de timidite.
"Eh bien, mon pauvre Anfry, c'est ainsi que vous faites honneur au
repas de premiere communion de nos enfants! Allons, allons, pas de
timidite, pas de fausse honte; nous sommes tous freres, aujourd'hui
plus que jamais. Mangez votre potage, mon brave Anfry. Attendez, je
vais vous donner du courage."
Et le comte, se levant, prit une bouteille de madere, la deboucha
lui-meme et en versa un verre a Anfry et a Mme Anfry; apres en avoir
offert a sa femme et en avoir verse un peu a chacun des enfants, il
emplit son verre, et, le portant a ses levres:
"A la sante de Blaise et de Jules! s'ecria-t-il.
--A la sante de M. le comte! s'ecria Anfry, se levant a son tour.
--A la sante d'Anfry et de Mme Anfry! s'ecria Jules.
--A la sante de M. le cure! dit Blaise en dernier.
--Bien dit, mon garcon, dit le comte. Buvons a la sante du bon cure,
auquel nous devons tous une grande reconnaissance. Allons, Anfry,
vous voila plus a l'aise, maintenant; mettez-vous-y tout a fait, et
continuons notre diner sagement et comme des gens qui conservent dans
leur coeur le souvenir des premieres heures de la matinee."
Le repas continua gai, mais calme; les enfants parlerent beaucoup de
leurs impressions avant et apres la sainte communion. La comtesse et
le comte les ecoutaient avec bonheur; il y avait dans les sentiments
developpes par les enfants un saint et heureux avenir.
Anfry et sa femme mangeaient sans parler; ils ecoutaient a peine, tant
ils etaient impressionnes de l'excelle
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