nt pas au temps qui s'ecoulait.
Le cure, au moment de quitter l'eglise, vint s'agenouiller une
derniere fois devant l'autel; il vit les deux enfants a genoux sur la
dalle, les mains jointes, les yeux fermes, l'air si recueilli qu'il
s'arreta pour les contempler.
"Mes enfants, leur dit-il enfin, levez-vous; une plus longue priere
a genoux sur la pierre pourrait vous fatiguer; conservez le bon Dieu
dans votre coeur, et souvenez-vous que toute votre vie peut devenir
une priere continuelle, en faisant toutes vos actions pour l'amour du
bon Dieu."
Jules et Blaise se releverent en silence et suivirent le cure, qui
se dirigeait vers le comte et la comtesse. Aux premieres paroles de
felicitation du cure, le comte releva son visage baigne de larmes, et,
voyant l'inquietude qui se peignait sur le visage du bon pretre:
"Les larmes que je repands, dit-il en se levant et marchant pres du
cure, sont le trop-plein d'un coeur inonde de joie et de bonheur.
C'est a Blaise que je les dois, et ma reconnaissance augmente a mesure
que j'avance dans la voie ou il m'a fait entrer.
LE CURE
Blaise est un saint enfant, monsieur le comte; plus qu'aucun autre je
suis a meme d'apprecier la grandeur de ses vertus et la beaute de
ses sentiments. Je le dis tout bas, de peur qu'il ne m'entende et ne
prenne de l'orgueil de mes paroles; mais en verite cet enfant a la
sagesse, la vertu et l'onction d'un saint.
LE COMTE
C'est bien vrai. Dans le temps ou j'avais concu de lui une si mauvaise
et si injuste opinion, j'ai eprouve la puissance de sa parole, de son
accent, de son regard meme. Ma femme a ressenti la meme impression
chaque fois qu'elle l'a entendu expliquer plutot que justifier sa
conduite, et Jules a subi aussi la puissance de cette vertu."
Tout en causant, ils etaient sortis de l'eglise. Helene suivait d'un
peu loin avec Jules et Blaise; ils etaient silencieux, mais leurs
visages rayonnaient de bonheur.
Le cure prit conge du comte; ils se mirent tous en route pour rentrer
chez eux. Les enfants marchaient en avant; le comte et la comtesse les
contemplaient avec tendresse.
"De quel bonheur j'ai manque me priver, mon ami, dit la comtesse en
essuyant ses yeux encore humides.
--Et quelle vie differente et heureuse nous allons mener; ma chere
Julie! dit le comte en lui serrant les mains dans les siennes. Nous
avions tous les elements du bonheur, et nous ne savions pas en user;
nos coeurs dormaient en nous, et nous vegetions m
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