du cimetiere;
la demi-obscurite l'avait fait paraitre encore plus gros et plus
blanc, et avait donne a sa tete et a son corps l'apparence d'une tete
et d'epaules d'homme. Blaise vit avec chagrin que le pauvre animal
avait un oeil hors de la tete et un cote du crane brise; ses
convulsions avaient cesse; il ne remuait plus.
"Voyons, Monsieur Jules, dit Blaise en repoussant le chat, continuons
notre route; je n'ai pas fait de bonne besogne en lancant ma pierre;
je vais demander aux ouvriers des fours a platre a qui appartient cet
animal. Eh bien, Monsieur Jules, vous ne venez pas?"
Et, se retournant vers Jules, il l'apercut etendu par terre, pale et
sans mouvement.
"Ah! mon Dieu! qu'est ce qu'il a donc? Il a perdu connaissance! Que
vais-je faire de lui, mon Dieu! Aussi pourquoi l'ai-je laisse venir
avec moi; ces enfants de chateau, c'est poltron comme tout; je
vous demande un peu, la! Y avait-il de quoi s'evanouir, s'effrayer
seulement?"
Le pauvre Blaise etait bien embarrasse: il lui soufflait sur la
figure, lui tapait le dedans des mains, lui jetait de l'eau sur le
visage. Enfin Jules soupira, fit un mouvement; Blaise lui souleva la
tete; il ouvrit les yeux, regarda autour de lui, apercut le chat blanc
etendu par terre, fut saisi de frayeur et voulut s'eloigner.
"N'ayez pas peur, Monsieur Jules, c'est un chat, rien qu'un pauvre
chat, que j'ai tue d'un coup de pierre, et qui, avant de mourir, s'est
venge sur votre joue et sur ma main."
Jules, un peu rassure, se leva lentement et saisit la main de Blaise
pour s'eloigner au plus vite de ce chat qu'il avait pris pour un
fantome, et qui lui avait occasionne une si grande frayeur.
"Attendez, Monsieur Jules, dit Blaise; laissez-moi emporter le
mort, pour que je le fasse reconnaitre par quelqu'un. Un beau chat,
ajouta-t-il en le ramassant.
JULES
Par ou allons-nous donc passer pour aller a la route?
BLAISE
Par le cimetiere, puisqu'il n'y a pas d'autre chemin. Nous ne pouvons
pas aller par la cour du moulin, les chiens nous barrent le passage.
JULES
Je ne veux point passer par le cimetiere..., non, non..., je ne le
veux pas, j'ai trop peur.
BLAISE
De quoi donc auriez-vous peur, Monsieur Jules, puisque vous voyez que
notre fantome n'en est pas un? Ce n'etait qu'un chat.
JULES
Je veux retourner par le chemin de la riviere, par lequel nous sommes
venus.
BLAISE
Et les fours a chaux, donc, nous ne passerons pas devant? C'est le
plus joli d
|