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Ou rien n'attirera le regard des passants.
Que voulez-vous? helas! notre mere nature,
Comme toute autre mere, a ses enfants gates,
Et pour les malvenus elle est avare et dure.
Aux uns tous les bonheurs et toutes les beautes!
L'occasion leur est toujours bonne et fidele:
Ils trouvent au desert des palais enchantes;
Ils tettent librement la feconde mamelle;
La chimere a leur voix s'empresse d'accourir,
Et tout l'or du Pactole entre leurs doigts ruisselle;
Les autres moins aimes, ont beau tordre et petrir
Avec leurs maigres mains la mamelle tarie,
Leur frere a bu le lait qui les devait nourrir.
S'il eclot quelque chose au milieu de leur vie,
Une petite fleur sous leur pale gazon,
Le sabot du vacher l'aura bientot fletrie,
Un rayon de soleil, brille a leur horizon:
Il fait beau dans leur ame; a coup sur un nuage
Avec un flot de pluie eteindra le rayon.
L'espoir le mieux fonde, le projet le plus sage,
Rien ne leur reussit; tout les trompe et leur ment:
Ils se perdent en mer sans quitter le rivage.
L'aigle, pour le briser, du haut du firmament,
Sur leur front decouvert lachera la tortue,
Car ils doivent perir inevitablement.
L'aigle manque son coup; quelque vieille statue,
Sans tremblement de terre, on ne sait pas pourquoi,
Quitte son piedestal, les ecrase et les tue.
Le coeur qu'ils ont choisi ne garde pas sa foi;
Leur chien meme les mord et leur donne la rage;
Un ami jurera qu'ils ont trahi le roi.
Fils du Danube, ils vont se noyer dans le Tage,
D'un bout du monde a l'autre ils courent a leur mort:
Ils auraient pu du moins s'epargner le voyage.
Si dur qu'il soit, il faut qu'ils remplissent leur sort;
Nul n'y peut resister, et le genou d'Hercule,
Pour un pareil athlete est a peine assez fort.
Apres la vie obscure une mort ridicule;
Apres le dur grabat un cercueil sans repos
Au bord d'un carrefour ou la foule circule.
Ils tombent inconnus de la mort des heros
Et quelque ambitieux, pour se hausser la taille,
Se fait effrontement un socle de leurs os.
Sur son trone d'airain, le destin qui s'en raille,
Imbibe leur eponge avec du fiel amer,
Et la necessite les tord dans sa tenaille.
Tout buisson trouve un dard pour dechirer sa chair,
Tout beau chemin pour eux cache une chausse-trappe,
Et les chaines de fleurs leur sont chaines de fer.
Si le tonnerre tombe, entre mille il les frappe,
Pour eux l'aveugle nuit semble prendre des yeux,
Tout plomb vole a leur coeur et pas un seul n'e
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