t-etre demain, peut-etre
aussitot qu'il se sera eloigne des bords de la Seine. En attendant, le
noye ouvre des yeux ternes, et, par un sourire blafard, remercie son
bienfaiteur; mais, il est faible encore, et ne peut faire aucun mouvement.
Sauver la vie a quelqu'un, que c'est beau! Et comme cette action rachete
de fautes! L'homme aux levres de bronze, occupe jusque-la a l'arracher
de la mort, regarde le jeune homme avec plus d'attention, et ses traits
ne lui paraissent pas inconnus. Il se dit qu'entre l'asphyxie, aux cheveux
blonds, et Holzer, il n'y a pas beaucoup de difference. Les voyez-vous
comme ils s'embrassent avec effusion! N'importe! L'homme a la prunelle
de jaspe tient a conserver l'apparence d'un role severe. Sans rien dire,
il prend son ami qu'il met en croupe, et le coursier s'eloigne au galop.
O toi, Holzer, qui te croyais si raisonnable et si fort, n'as-tu pas vu,
par ton exemple meme, comme il est difficile, dans un acces de desespoir,
de conserver le sang-froid dont tu te vantes? J'espere que tu ne me
causeras plus un pareil chagrin, et moi, de mon cote, je t'ai promis de ne
jamais attenter a ma vie.
* * * * *
Il y a des heures dans la vie ou l'homme, a la chevelure pouilleuse,
jette, l'oeil fixe, des regards fauves sur les membranes vertes de
l'espace; car, il lui semble entendre, devant lui, les ironiques huees
d'un fantome. Il chancelle et courbe la tete: ce qu'il a entendu, c'est
la voix de la conscience. Alors, il s'elance de la maison, avec la
vitesse d'un fou, prend la premiere direction qui s'offre a sa stupeur,
et devore les plaines rugueuses de la campagne. Mais, le fantome jaune
ne le perd pas de vue, et le poursuit avec une egale vitesse.
Quelquefois, dans une nuit d'orage, pendant que des legions de poulpes
ailes, ressemblant de loin a des corbeaux, planent au-dessus des nuages,
en se dirigeant d'une rame raide vers les cites des humains, avec la
mission de les avertir de changer de conduite, le caillou, a l'oeil
sombre, voit deux etres passer a la lueur de l'eclair, l'un derriere
l'autre; et, essuyant une furtive larme de compassion, qui coule de sa
paupiere glacee, il s'ecrie: "Certes, il le merite; et ce n'est que
justice." Apres avoir dit cela, il se replace dans son attitude
farouche, et continue de regarder, avec un tremblement nerveux, la
chasse a l'homme, et les grandes levres du vagin d'ombre, d'ou
decoulent, sans cesse, comme un fleuve, d'immenses
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