r seul, au milieu des tourments,
et sans consolation. La, dans un bosquet entoure de fleurs, dort
l'hermaphrodite, profondement assoupi sur le gazon, mouille de ses pleurs.
Les oiseaux, eveilles, contemplent avec ravissement cette figure
melancolique, a travers les branches des arbres, et le rossignol ne veut
pas faire entendre ses cavatines de cristal. Le bois est devenu auguste
comme une tombe, par la presence nocturne de l'hermaphrodite infortune.
O voyageur egare, par ton esprit d'aventure qui t'a fait quitter ton
pere et ta mere, des l'age le plus tendre: par les souffrances que la
soif t'a causees, dans le desert: par ta patrie que tu cherches
peut-etre, apres avoir longtemps erre, proscrit, dans des contrees
etrangeres; par ton coursier, ton fidele ami, qui a supporte, avec toi,
l'exil et l'intemperie des climats que te faisait parcourir ton humeur
vagabonde; par la dignite que donnent a l'homme les voyages sur les
terres lointaines et les mers inexplorees, au milieu des glacons
polaires, ou sous l'influence d'un soleil torride, ne touche pas avec
ta main, comme avec un fremissement de la brise, ces boucles de cheveux,
repandues sur le sol, et qui se melent a l'herbe verte. Ecarte-toi de
plusieurs pas, et tu agiras mieux ainsi. Cette chevelure est sacree;
c'est l'hermaphrodite lui-meme qui l'a voulu. Il ne veut pas que des
levres humaines embrassent religieusement ses cheveux, parfumes par le
souffle de la montagne, pas plus que son front, qui resplendit, en cet
instant, comme les etoiles du firmament. Mais, il vaut mieux croire
que c'est une etoile elle-meme qui est descendue de son orbite, en
traversant l'espace, sur ce front majestueux, qu'elle entoure avec sa
clarte de diamant, comme d'une aureole. La nuit, ecartant du doigt sa
tristesse, se revet de tous ses charmes pour feter le sommeil de cette
incarnation de la pudeur, de cette image parfaite de l'innocence des
anges: le bruissement des insectes est moins perceptible. Les branches
penchent sur lui leur elevation touffue, afin de le preserver de la
rosee, et la brise, faisant resonner les cordes de sa harpe melodieuse,
envoie ses accords joyeux, a travers le silence universel, vers ces
paupieres baissees, qui croient assister, immobiles, au concert cadence
des mondes suspendus. Il reve qu'il est heureux; que sa nature
corporelle a change: ou que, du moins, il s'est envole sur un nuage
pourpre, vers une autre sphere, habitee par des etres de meme nature que
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