asaient
de leurs ailes de feu mes cheveux calcines. Plus tard, quand je connus
davantage l'humanite, a ce sentiment de pitie se joignit une fureur
intense contre cette tigresse maratre, dont les enfants endurcis ne savent
que maudire et faire le mal. Audace du mensonge! ils disent que le mal
n'est chez eux qu'a l'etat d'exception!... Maintenant, c'est fini depuis
longtemps; depuis longtemps, je n'adresse la parole a personne. O vous,
qui que vous soyez, quand vous serez a cote de moi, que les cordes de
votre glotte ne laissent echapper aucune intonation; que votre larynx
immobile n'aille pas s'efforcer de surpasser le rossignol; et vous-meme
n'essayez nullement de me faire connaitre votre ame a l'aide du langage.
Gardez un silence religieux, que rien n'interrompe; croisez humblement
vos mains sur la poitrine, et dirigez vos paupieres sur le bas. Je vous
l'ai dit, depuis la vision qui me fit connaitre la verite supreme, assez
de cauchemars ont suce avidement ma gorge, pendant les nuits et les jours,
pour avoir encore le courage de renouveler, meme par la pensee, les
souffrances que j'eprouvai dans cette heure infernale, qui me poursuit
sans relache de son souvenir. Oh! quand vous entendez l'avalanche de
neige tomber du haut de la froide montagne; la lionne se plaindre, au
desert aride, de la disparition de ses petits; la tempete accomplir sa
destinee; le condamne mugir, dans la prison, la veille de la guillotine;
et le poulpe feroce raconter, aux vagues de la mer, ses victoires sur
les nageurs et les naufrages, dites-le, ces voix majestueuses ne
sont-elle pas plus belles que le ricanement de l'homme!
* * * * *
Il existe un insecte que les hommes nourrissent a leurs frais. Ils ne
lui doivent rien; mais, ils le craignent. Celui-ci, qui n'aime pas le
vin, mais qui prefere le sang, si on ne satisfaisait pas a ses besoins
legitimes, serait capable par un pouvoir occulte, de devenir aussi gros
qu'un elephant, d'ecraser les hommes comme des epis. Aussi faut-il voir
comme on le respecte, comme on l'entoure d'une veneration canine, comme
on le place en haute estime au-dessus des animaux de la creation. On lui
donne la tete pour trone, et lui, accroche ses griffes a la racine des
cheveux, avec dignite. Plus tard, lorsqu'il est gras et qu'il entre dans
un age avance, en imitant la coutume d'un peuple ancien, on le tue, afin
de ne pas lui faire sentir les atteintes de la vieillesse. On lui fait
des
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