jusqu'au pied du mur, et construit sur une elevation. Il est entoure d'une
citadelle qu'il domine, et baigne par une riviere qu'on dit etre l'une des
quatre qui sortent du paradis terrestre. Si le fait est vrai, je l'ignore.
Tout ce que je sais, c'est qu'elle descend entre le levant et le midi, plus
pres du premier que du second, (est-sud-est), et qu'elle va se perdre a
Antioche.
La est la roue la plus haute et la plus grande que j'aie vue de ma vie.
Elle est mise en mouvement par la riviere, et fournit a la consommation des
habitans, quoique leur nombre soit considerable, la quantite d'eau qui leur
est necessaire. Cette eau tombe en une auge creusee dans la roche du
chateau; de la elle se porte vers la ville et en parcourt les rues dans un
canal forme par de grands piliers carres qui ont douze pieds de haut sur
deux de large.
Il me manquoit encore differentes choses pour etre, en tout comme mes
compagnons de voyage. Le namelouck m'en avoit averti, et mon hote Laurent
me mena lui-meme au bazar pour en faire l'acquisition. C'etoient de petites
coiffes de soie a la mode des Turcomans, un bonnet pour mettre sous la
coiffe, des cuilleres Turques, des couteaux avec leur fusil, un peigne avec
son etui, et un gobelet de cuir. Tout celle s'attache et se suspend a
l'epee.
J'achetai aussi des poucons [Footnote: Sorte de doigtier qu'on mettoit au
pouce, afin de le garantir et de le defendra de l'impression de la corde.]
pour tirer de l'arc, un tarquais nouveau tout garni, pour epargner le mien,
qui etoit tres-beau, et que je voulois conserver; enfin un capinat: c'est
une robe de feutre, blanche, tres-fine, et impenetrable a la pluie.
En route je m'etois lie avec quelques-uns de mes compagnons de caravane.
Ceux ci, quand ils surent que j'etois loge chez un Franc, vinrent me
trouver pour me demander de leur procurer du vin. Le vin leur est defendu
par leur loi, et ils n'auroient ose en boire devant les leurs; mais ils
esperoient le faire sans risque chez un Franc, et cependant ils revenoient
de la Mecque. J'en parlai a mon hote Laurent, qui me dit qu'il ne
l'oseroit, parce que, si la chose etoit sue, il courroit les plus grands
dangers. J'allai leur rendre cette reponse; mais ils en avoient deja
cherche ailleurs, et venoient d'en trouver chez un Grec. Ils me proposerent
donc, soit par pure amitie, soit pour etre autorise, aupres du Grec a
boire, d'aller avec eux chez lui, et je les y accompagnai.
Cet homme nous conduisit d
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