-la est interrompu par quelques
eclats de rire, qui ne deconcertent point l'orateur, beaucoup plus
effrayant que risible. Il continue: "Telle etait mon opinion, ecrite,
signee, publiquement soutenue. Si elle etait fausse, il fallait la
combattre, m'eclairer, et ne point me denoncer au despotisme."
"On m'a accuse d'ambition! mais voyez, et jugez-moi. Si j'avais seulement
voulu mettre un prix a mon silence, je serais gorge d'or, et je suis
pauvre! Poursuivi sans cesse, j'ai erre de souterrains en souterrains, et
j'ai preche la verite sur le billot!"
"Pour vous, ouvrez les yeux; loin de consumer votre temps en discussions
scandaleuses, perfectionnez la declaration des droits, etablissez la
constitution, et posez les bases du gouvernement juste et libre, qui est
le veritable objet de vos travaux."
Une attention universelle avait ete accordee a cet homme etrange, et
l'assemblee, stupefaite d'un systeme aussi effrayant et aussi calcule,
avait garde le silence. Quelques partisans de Marat, enhardis par ce
silence, avaient applaudi; mais ils n'avaient pas ete imites, et Marat
avait repris sa place sans recevoir ni applaudissemens, ni marques de
colere.
Vergniaud, le plus pur, le plus sage des girondins, croit devoir prendre
la parole pour reveiller l'indignation de l'assemblee. Il deplore le
malheur d'avoir a repondre a un homme charge de decrets!... Chabot,
Tallien, se recrient a ces mots, et demandent si ce sont les decrets
lances par le Chatelet pour avoir devoile Lafayette. Vergniaud insiste, et
deplore d'avoir a repondre a un homme qui n'a pas purge les decrets dont
il est charge, a un homme tout degouttant de calomnies, de fiel et de
sang! Les murmures se renouvellent; mais il continue avec fermete, et
apres avoir distingue, dans la deputation de Paris, David, Dusaulx et
quelques autres membres, il prend en mains la fameuse circulaire de la
commune que nous avons deja citee, et la lit tout entiere. Cependant comme
elle etait deja connue, elle ne produit pas autant d'effet qu'une autre
piece, dont le depute Boileau fait a son tour la lecture. C'est une
feuille imprimee par Marat, le jour meme, et dans laquelle il dit: "Une
seule reflexion m'accable, c'est que tous mes efforts pour sauver le
peuple n'aboutiront a rien sans une nouvelle insurrection. A voir la
trempe de la plupart des deputes a la convention nationale, je desespere
du salut public. Si dans les huit premieres seances les bases de la
constitution ne so
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