e que la perte d'un seul homme n'entrainerait
pas celle de la liberte. Tous les jacobins applaudirent a ces beaux
sentimens, en assurant au jeune Robespierre qu'il n'en serait rien, et que
son frere ne perirait pas.
Des plaintes toutes differentes furent proferees a l'assemblee, et la, on
denonca les cris pousses contre Roland, Lasource, Guadet, etc. Roland se
plaignit de l'inutilite de ses requisitions au departement et a la commune
pour obtenir la force armee. On discuta beaucoup, on echangea des
reproches, et la journee s'ecoula sans prendre aucune mesure. Le
lendemain, 5 novembre, Robespierre parut enfin a la tribune.
Le concours etait general, et on attendait avec impatience le resultat de
cette discussion solennelle. Le discours de Robespierre etait volumineux
et prepare avec soin. Ses reponses aux accusations de Louvet furent celles
qu'on ne manque jamais de faire en pareil cas: "Vous m'accusez, dit-il,
d'aspirer a la tyrannie; mais, pour y parvenir, il faut des moyens, et ou
sont mes tresors et mes armees? Vous pretendez que j'ai eleve dans les
Jacobins l'edifice de ma puissance. Mais que prouve cela? c'est que j'y
etais plus ecoute, que je m'adressais peut-etre mieux que vous a la raison
de cette societe, et que vous ne voulez ici venger que les disgraces de
votre amour-propre. Vous pretendez que cette societe celebre est
degeneree; mais demandez un decret d'accusation contre elle, alors je
prendrai le soin de la justifier, et nous verrons si vous serez plus
heureux ou plus persuasifs que Leopold et Lafayette. Vous pretendez que je
n'ai paru a la commune que deux jours apres le 10 aout, et qu'alors je me
suis moi-meme installe au bureau. Mais d'abord je n'y ai pas ete appele
plus tot; et, quand je me suis presente au bureau, ce n'etait pas pour m'y
installer, mais pour faire verifier mes pouvoirs. Vous ajoutez que j'ai
insulte l'assemblee legislative; que je l'ai menacee du tocsin: le fait
est faux. Quelqu'un, place pres de moi, m'accusa de sonner le tocsin; je
repondis a l'interlocuteur que les sonneurs de tocsin etaient ceux qui,
par l'injustice, aigrissaient les esprits; et alors l'un de mes collegues,
moins reserve, ajouta qu'on le sonnerait. Voila le fait unique sur lequel
mon accusateur a bati cette fable. Dans l'assemblee electorale, j'ai pris
la parole, mais on etait convenu de la prendre; j'y ai presente quelques
observations, et plusieurs ont use du meme droit. Je n'ai accuse ni
recommande personne.
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