immole tous ceux qu'ils suspectaient de leur
etre contraires, de tels esprits ne concevaient, pour terminer la disette,
qu'un moyen, c'etait toujours la force. Ils voulaient qu'on arrachat les
fermiers a leur inertie, qu'on les obligeat a se rendre dans les marches;
que la ils fussent contraints de vendre leurs denrees a un prix fixe par
les communes; que les grains ne quittassent pas les lieux, et n'allassent
pas s'accumuler dans les greniers de ce qu'on appelait les accapareurs.
Ils demandaient donc la presence forcee des commercans dans les marches,
la taxe des prix ou _maximum_, la prohibition de toute circulation, enfin
l'obeissance du commerce a leurs desirs, non par l'attrait ordinaire du
gain, mais par la crainte des peines et de la mort.
Les esprits moderes desiraient au contraire qu'on laissat le commerce
reprendre son cours, en dissipant les craintes des fermiers, en les
laissant libres de fixer leurs prix, en leur presentant l'attrait d'un
echange libre, sur et avantageux, en permettant la circulation d'un
departement a l'autre, pour pouvoir secourir ceux qui ne produisaient pas
de ble. Ils proscrivaient ainsi la taxe, les prohibitions de toute espece,
et reclamaient avec les economistes l'entiere liberte du commerce des
grains dans l'etendue de la France. D'apres l'avis de Barbaroux, assez
verse dans ces matieres, ils demandaient que l'exportation a l'etranger
fut soumise a un droit qui augmenterait quand les prix viendraient a
s'elever, et qui rendrait ainsi la sortie plus difficile quand la presence
de la denree serait plus necessaire. Ils n'admettaient l'intervention
administrative que pour l'etablissement de certains marches, destines aux
cas extraordinaires. Ils ne voulaient employer la severite que contre les
perturbateurs qui violenteraient les fermiers sur les routes ou dans les
marches; ils rejetaient enfin l'emploi des chatimens a l'egard du
commerce, car la crainte peut etre un moyen de repression, mais elle n'est
jamais un moyen d'action; elle paralyse, mais elle n'anime pas les hommes.
Quand un parti devient maitre dans un etat, il se fait gouvernement, et
bientot forme les voeux et contracte les prejuges ordinaires de tout
gouvernement; il veut a tout prix faire avancer toutes choses, et employer
la force comme moyen universel. C'est ainsi que les ardens amis de la
liberte avaient pour les systemes prohibitifs la predilection de tous les
gouvernemens, et qu'ils trouvaient pour adversaires ce
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