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raison et qu'ils y vissent encore tres-clair.
Le soir, lorsqu'ils voulurent retourner a leur hotel, ils passerent
devant une maison de jeu qui avait pour enseigne: _la Verandah_. Une
brillante clarte qui se repandait hors de la maison et illuminait la rue
eblouit les yeux des trois amis etonnes. Ils voulaient s'arreter un
instant pour jeter un coup d'oeil dans la salle; mais les gens a moitie
ivres qui sortaient et entraient les obligerent a se mettre de cote.
--Et pourquoi n'entrerions-nous pas la dedans? demanda Jean Creps.
--Oui, pourquoi n'irions-nous pas voir ce qui s'y passe? ajouta Donat,
qui avait vu briller au loin quelque chose comme un tas d'or.
--Une maison de jeu! murmura Victor hesitant.
--Allons, allons, nous n'avons pas besoin de jouer. Avec un dollar, nous
en sommes quittes. Encore une goutte de rhum, la derniere. Nous ne
pouvons pas quitter San-Francisco sans voir ce que c'est qu'une maison
de jeu.
--Surtout, remarqua Donat, que j'ai vu etinceler la-bas, sur une table,
une montagne d'or, de la meme espece que celui que nous allons trouver.
Cela donne toujours un avant-gout.
Victor se laissa persuader et suivit ses amis dans la maison de jeu, ou
heureusement ils trouverent, dans un coin, un banc pour s'asseoir.
Lorsqu'ils eurent recu et paye leur petit verre de rhum, ils promenerent
leurs regards autour d'eux.
Ils etaient dans une grande salle splendidement eclairee, mais si
remplie de la fumee du tabac et des vapeurs de l'eau-de-vie, qu'en
entrant on etait a demi suffoque et qu'on sentait ses yeux se mouiller
de larmes avant de pouvoir s'habituer a cet air vicie et a cette
atmosphere chargee de nuages. Une population etrange et singulierement
melee grouillait dans cette salle. On y voyait bien quelques personnes
qui avaient l'air d'honnetes gens, mais la plus grande partie des
habitues se composait de tout ce que la Californie offrait de plus
ignoble, de plus sauvage et de plus repoussant. Outre les joueurs, on
voyait s'y promener des hommes a figures suspectes qui avaient
probablement tout perdu et passaient toute la soiree dans la maison de
jeu pour voir de l'or, et epiaient peut-etre l'occasion de s'en procurer
d'une maniere quelconque. Il regnait la un murmure assourdissant de voix
confuses, de cris de joie et de maledictions, que dominaient parfois les
sons retentissants d'une musique entrainante. L'orchestre ne se
composait pourtant que d'un seul artiste. Cet homme avait un ch
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